Saga Lamborghini

LAMBORGHINI Espada

Gilles Bonnafous le 06/05/2002

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LAMBORGHINI
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Concilier les hautes performances d'une GT et l'habitabilité d'une quatre places, tel a été le rêve récurrent de nombreux constructeurs de voitures de prestige. Tous ont achoppé sur cette quadrature du cercle. Tous, sauf un. Beaucoup en ont rêvé, Lamborghini l'a fait.

L'Espada est la seule GT à avoir dépassé le concept de la 2 + 2, cette formule hybride que Philippe Guédon, le P.D.G. de Matra Automobile, raille avec humour (et pertinence) en la qualifiant de " 2 + 2 singes " ! Certes, certains constructeurs ont proposé de confortables 2 + 2, comme l'Iso Rivolta de 1962, une belle GT spacieuse de 300 ch, la Maserati Mexico et la Ferrari 365 GT 2 + 2 - ultérieurement la De Tomaso Longchamp, la Maserati Kyalami et la Ferrari 365 GT 4 2 + 2. Mais aucune de ces GT n'offrait quatre vraies places, si ce n'est la marginale et très confidentielle Monteverdi 375 L sortie en 1968. Et l'on ne peut assimiler à cette catégorie de véhicules les quatre portes puissamment motorisées comme la Maserati Quattroporte ou les Françaises équipées de V8 américains, Facel Vega Excellence ou Monica de Jean Tastevin (au début des années 70).

Après avoir bousculé le train-train de l'univers GT en produisant des machines à doubles arbres à cames en tête, suspension indépendante et moteur central, Lamborghini allait remettre en cause les idées reçues en matière d'habitabilité. Vraie GT, l'Espada est aussi une vraie quatre places. Un modèle partiellement conçu pour le marché américain, si important pour Lamborghini et très amateur de ce genre de voitures.

LAMBORGHINI
LAMBORGHINI

Lamborghini Marzal par Bertone
Lamborghini Marzal par Bertone
LAMBORGHINI

Le concept et la carrosserie de l'Espada dérivent de la Marzal réalisée en collaboration avec Bertone. Présenté au salon de Genève de 1967, ce concept car particulièrement audacieux mariait l'habitabilité d'une quatre places à un moteur placé transversalement en porte-à-faux arrière - un six cylindres fruit de la partition du V12 Lamborghini. Une architecture peu réaliste pour un modèle de production et une motorisation à la puissance insuffisante pour une GT de haut de gamme. L'Espada revient donc à l'architecture conventionnelle à moteur avant, avec le V12 en entier !

La structure de l'Espada est extrapolée du châssis de la 400 GT, que Gianpaolo Dallara a modifié et adapté au concept nouveau de la voiture. L'empattement a été allongé de dix centimètres (2,65 mètres) et la mécanique avancée pour offrir le maximum d'espace à l'habitacle. Le V12 de quatre litres a été porté à 325 ch, soit à cinq chevaux près la même puissance que la Ferrari 365 GT 2 + 2.

Le moteur de l'Espada 400 GT série 1
Le moteur de l'Espada 400 GT série 1 D.R
Premier prototype de l'Espada
Premier prototype de l'Espada D.R

Présentée au salon de Genève de 1968 - il s'agit encore d'un prototype -, l'Espada présente un traitement plus conventionnel que celui de la Marzal, caractérisée par l'exceptionnelle ampleur de ses surfaces transparentes - un véritable aquarium ! La lunette arrière est toutefois prolongée par une vitre verticale disposée sur la poupe et protégée par une grille.

Lamborghini Espada 400 GT série 1
Lamborghini Espada 400 GT série 1 D.R
Mannequin de bois
Mannequin de bois D.R

Comme pour la Marzal, le design de l'Espada est dû à Marcello Gandini. Sa ligne fuselée constitue l'une des plus belles créations du jeune artiste. Malgré la longueur de la voiture (4,70 mètres), on ne peut qu'admirer l'impressionnant équilibre des proportions et la très belle assise de la silhouette, favorisée par les voies élargies de onze centimètres par rapport à la 400 GT. Un pur chef-d'œuvre.

Plus sportive dans l'esprit que la Ferrari 365 GT 2 + 2, l'Espada ne bénéficie ni de la direction assistée, ni de la suspension oléopneumatique de la voiture au cheval cabré. Mise au point par Langen, une firme allemande, la suspension Lancomatic apparaîtra néanmoins au salon de Turin 1968. Dans ce système, les combinés ressorts-amortisseurs sont remplacés par une jambe télescopique dont le débattement est contrôlé par un fluide. Proposée en option, cette formule ne connaîtra guère de succès.

Entrée en production plusieurs mois après sa présentation, l'Espada ne prend son envol qu'en 1969, où 148 exemplaires sont fabriqués - son succès, qui va aller croissant, fera de l'ombre à l'Islero. Plusieurs améliorations sont apportées à l'occasion du salon de Bruxelles de 1970, dont des freins à disques autoventilés et des joints homocinétiques sur les demi-arbres de transmission. Surtout la puissance du moteur passe à 350 ch (soit 25 ch supplémentaires) grâce à un nouveau profil des arbres à cames. L'habitacle est également remanié et la finition s'avère en net progrès. La planche de bord, où apparaissent des boiseries, perd sa décoration hexagonale héritée de la Marzal. Quant à la carrosserie, elle est pratiquement inchangée - la vitre verticale arrière perd sa grille et, en 1972, de nouvelles roues à cinq écrous seront montées. Cette Espada de deuxième série poursuit l'heureuse carrière du modèle avec un excellent niveau de production (plus de 200 unités annuelles).

Intérieur de l'Espada Série 2
Intérieur de l'Espada Série 2
Intérieur de l'Espada Série 2
Intérieur de l'Espada Série 2

L'Espada 400 GTE
L'Espada 400 GTE
La Faena de Frua
La Faena de Frua

Fruit de toutes les attentions de son constructeur, l'Espada bénéficie de nouveaux perfectionnements au salon de Turin de 1972. Cette troisième série, dite GTE (une appellation non officielle), se caractérise par quelques modifications de suspension, la présence de deux alternateurs et, enfin, d'une direction assistée - finies les manœuvres de camionneur ! Elle est reconnaissable à sa nouvelle calandre grillagée et à sa planche de bord entièrement redessinée, où l'aluminium se substitue au bois. En mars 1974, le client peut opter pour une transmission automatique Chrysler Torqueflite à trois rapports - qui fait perdre vingt kilomètre/heure…

Signalons pour l'anecdote qu'en 1978, le carrossier Pietro Frua présentera sur son stand du salon de Turin le prototype d'une quatre portes basée sur l'Espada. Baptisée Faena, cette voiture sera la seule Lamborghini construite dans cette définition. Cet exemplaire restera unique.

L'intérieur de la 400 GTE
L'intérieur de la 400 GTE
Espada GTE Série 3
Espada GTE Série 3 D.R

Bien qu'enlaidie par des pare-chocs américains à partir de 1976, l'Espada sera fabriquée jusqu'à la fin de 1978 - elle restera au tarif en 1979. Avec 1224 exemplaires produits, elle a représenté pour Lamborghini une remarquable réussite commerciale.

Luxueuse et magnifique Grand Tourisme pouvant accueillir quatre adultes tout en roulant à 250 km/h, avec 350 ch et 40 mkg de couple, l'Espada est une voiture hors normes. Elle le restera. Premier du genre, ce véritable " dream car " mis en production demeurera unique. Aujourd'hui victime de la désaffection qui touche toutes les GT " familiales ", sa cote en collection s'avère des plus raisonnables - pour ne pas dire dérisoire pour un modèle aussi exceptionnel. Avis aux collectionneurs malins !

Espada 400 GTE
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Commentaires

avatar de tacot21
tacot21 a dit le 15-03-2014 à 17:28
J'AI POSSEDE DE 1972 A 1976 UNE ESPADA..J'AI EFFECTUE + DE 40000 KMS EN FRANCE COMME A L'ETRANGER...PAS DE PROBLEMES DE MECANIQUE....J'AI POSSEDE ENSUITE DIFFERENTES VOITURES DE TYPE VARIE (BERLINES OU SPORTIVES)...MAIS A MES YEUX L'ESPADA EST RESTEE LE + BEAU COUPE 4 VRAIES PLACES DU MONDE...J'Y PENSE TRES SOUVENT!!!!!!!!!!
avatar de DRAGON52
DRAGON52 a dit le 14-10-2013 à 14:51
Encore aujourd'hui,je reste amoureux de cette voiture fabuleuse et exceptionnelle.Gardez le design,ajoutez-y les solutions technique d 'aujourd'hui, et vous obtenez la plus belle et authentique GT familiale au monde.Je n'ai pas possédé l'Espada , mais j'ai été , au moment de sa production,propriétaire d'une ISLERO,et je connaissais un propriétaire d'Espada de couleur blanche.J'ai dû me séparer de mon Islero , partie en Grande Bretagne chez un collectionneur.Cette Islero était bleu métallisé,intérieur cuir noir avec le V12.Le chant du moteur vaut a lui seul l'expérience de l'avoir vécue,et pour l'avoir testée sur un circuit de course de côtes, tard dans la nuit , j'ai été stupéfié de l'équilibre et des puissances de cette voiture.J'imagine que l'ESPADA devait avoir un comportement tout aussi équilibré.Seul la manque de moyens m'empêche actuellement de racheter une ESPADA ou une ISLERO, tant elles m'ont marqué et envoûté . Merci a ces "magiciens" de l'automobile...