Rétromobile 2003

La Bluebird de Donald Campbell

Gilles Bonnafous le 17/02/2003

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Avec la Bluebird de 4500 ch, Donald Campbell porte en 1964 le record du monde de vitesse terrestre à plus de 648 km/h. Quelques mois plus tard, il s'adjuge le même record sur l'eau à 445 km/h.

L'épopée des records de vitesse de la famille Campbell débute en 1923, quand Malcolm, sur une Sunbeam V12 de 350 ch, atteint les 241 km/h. En 1927, il portera le record du monde à 281 km/h sur la Napier-Campbell Bluebird. Après avoir, en 1935, atteint son objectif de dépasser les 300 miles à l'heure, il se consacrera aux records sur l'eau.

Mettant ses pas dans ceux de son père, c'est sur ce terrain (aquatique) que Donald Campbell, né en 1921, commence sa carrière de chasseurs de records. Le 23 juillet 1955, il est le premier à atteindre, sur le lac Ullswater, la vitesse de 325 km/h sur le Bluebird K7, un bateau propulsé par un réacteur. Jusqu'en 1964, cette même machine lui permettra de s'approprier pas moins de sept records du monde.

 La Bluebird de Donald Campbell  La Bluebird de Donald Campbell

C'est à partir de 1960 que Donald Campbell commence à s'intéresser à l'automobile. Sa première tentative terrestre a pour cadre le Lac Salé de Bonneville, dans l'Utah. Le 16 septembre 1960, aux commandes de son Bluebird type CN7, il s'adjuge le record du monde en réussissant la vitesse de 482,7 km/h. Satisfait de sa performance, Donald Campbell décide d'enchaîner aussitôt avec une tentative de record d'accélération. Alors que le Bluebird roule à une vitesse (estimée) de 587 km/h, atteinte sur une distance de 2,7 kilomètres seulement - ce qui représente la plus forte accélération jamais enregistrée sur un véhicule à quatre roues -, une rafale de vent envoie le bolide hors de la piste idéale, là où le sable est profond. Déséquilibrée, la voiture part en dérapage sur une distance d'environ trois cents mètres et effectue plusieurs toupies avant de se retourner. Donald Campbell s'en sort avec une fracture du crâne. Quant au Bluebird, si sa mécanique est intacte, la carrosserie et les trains roulants sont détruits.

Rétabli après une longue convalescence, notre héros part en Australie en 1963 pour de nouvelles aventures. Entre temps, il a fait reconstruire le Bluebird à l'identique, à ceci près que la nouvelle voiture est équipée d'un imposant aileron à la fonction stabilisatrice. Réalisé à Coventry par Motor Panels, le CN7 reçoit un châssis de type nid d'abeille constitué de panneaux d'alliage léger. Il est motorisé par un turbopropulseur Bristol Siddeley Proteus 705 de 4500 ch tournant à 11 000 tr/mn. Le Bluebird bénéficie de quatre roues motrices et d'une suspension indépendante, l'amortissement étant confié à un système oléopneumatique Girling (à l'azote). L'angle de braquage des roues est de quatre degrés seulement de part et d'autre de l'axe médian. Des ventilateurs électriques destinés à refroidir les freins à disques et un système de télémétrie complètent l'équipement.

Les premiers essais se déroulent en mai 1963, puis en juin et juillet 1964. Après de nombreux retards consécutifs à une météo défavorable (pluie), Donald Campbell s'élance le 17 juillet 1964 sur le lac Eyre, situé dans le Sud de l'Australie. Le succès est au rendez-vous avec un nouveau record établi à 648,588 km/h. Il est à noter que la vitesse atteinte a été la même dans les deux sens, malgré les différences liées à la surface du sol et à la force du vent. Rappelons à cet égard le règlement édicté par la FIA pour les véhicules terrestres de Classe A (quatre roues obligatoires mais taille non limitée) : pour qu'un record du monde de vitesse soit homologué, le véhicule doit effectuer deux parcours d'une longueur minimum d'un mile chacun, dans les deux sens (aller et retour), et dans l'intervalle d'une heure maximum (le temps notamment de refaire le plein de carburant).

En décembre 1964, toujours en Australie, mais cette fois sur le lac Dumbleyung, Donald Campbell s'adjuge un nouveau et étonnant record du monde de vitesse sur l'eau à 444,615 km/h. Ce nouvel exploit fait de lui le seul détenteur des deux records terrestre et aquatique. Trois ans plus tard, le 4 janvier 1967, alors qu'il tente d'être le premier pilote à franchir le cap des 300 miles à l'heure (482,7 km/h) sur l'eau, il est victime d'un accident à Coniston Water. Il venait de réussir un premier parcours à 477,873 km/h et s'était aussitôt élancé pour le second, sans même refaire le plein. A plus de 300 miles à l'heure, le bateau décolla et se désintégra en retrouvant la surface. Donald Campbell coula avec son engin et disparut. Grâce aux efforts opiniâtres de sa fille Gina, son corps sera retrouvé en 2001, sorti du lac et identifié grâce aux tests ADN.

Le record de vitesse terrestre de Donald Campbell sera largement dépassé par des véhicules ressemblant plus à des avions sur roues qu'à des automobiles, les autorités internationales ayant accepté les véhicules mus par des réacteurs et des fusées - apparus dans les années soixante. En 1970, Gary Gabelich, un astronaute, portera le record à 1001,45 km/h sur Blue Flame, un engin équipé d'un moteur de fusée dérivé du programme spatial américain. Treize ans plus tard, la technique du réacteur reprendra le dessus avec le Thrust II du Britannique Richard Noble (1019,25 km/h). Aujourd'hui, le record appartient à Andy Green, qui, sur Thrust SSC, a atteint mach 1,02 (1227,72 km/h) en 1997 dans le désert du Nevada.

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Commentaires

avatar de stratochris
stratochris a dit le 04-10-2012 à 21:32
Les plans du Bluebird terrestre sont commencés dès 1958. et Donald Campbell ne s'adjuge aucun record en 1960 (si ce n'est celui de s'en sortir vivant dans le crash le plus rapide de l'histoire)! A ce moment, le record est toujours détenu par John Cobb depuis 1947 avec 634 km/h. Il ne sera battu par Campbell qu'en 1964 avec 648 km/h, toujours avec le Bluebird, reconstruit après son crash de 1960. Malheureusement, le record avait déjà été battu par Breedlove en 1963 (655 km/h), sur le Spirit of America, véhicule non propulsé par ses roues car à réaction. Si la FIA refuse d'homologuer le record (le "spirit" n'avait que trois roues!), la FIM l'accepta , en catégorie sidecar!!! Christian Bormans