Essai CHEVROLET Corvette C6

Jean-François Destin le 08/02/2005

Toujours virile à piloter et jamais vraiment soumise, la nouvelle Corvette C6 dispense des sensations qu'aucune autre américaine n'apporte.

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Présentation

V8 porté à 6 litres, 404 chevaux, 300 km/h : la Corvette C6 ne s'est jamais autant rapprochée des GTS de compétition victorieuses ces dernières années aux 24 Heures du Mans. Cette sixième édition d'une légendaire lignée d'un demi-siècle ne fait plus partie de Chevrolet. Corvette devient une marque entière et une gamme puisque le cabriolet est attendu cet été tout comme une version encore plus musclée sous l'appellation Z06.

Face à ce déferlement de puissance et aux apports technologiques destinés à rendre le pilotage plus efficace, on pouvait s'attendre à découvrir une silhouette agressive, voire menaçante. C'est tout le contraire, surtout à l'avant où les galbes tout en nuances ont fait fondre les muscles saillants de certaines de ses aînées. Plus grave aux yeux de certains : les célèbres phares escamotables cèdent, pour la première fois, leurs places à des optiques classiques étirés vers les ailes.

Plus courte pour éviter une prise de poids et gagner en agilité, la Corvette C6 hérite d'un contenu technologique enrichi voire inédit par l'arrivée de systèmes électroniques comme l'optionnel Magnetic Selective Ride Control. En fait, un amortissement piloté basé sur deux modes, tourisme ou sport. Châssis, direction, freinage ont été reprogrammés pour canaliser et surveiller les performances en hausse spectaculaires.

Toujours virile à piloter et jamais vraiment soumise, notamment sur routes mouillées, la nouvelle Corvette C6 dispense des sensations qu'aucune autre américaine n'apporte, même la décevante dernière évolution de la Ford Mustang. Son antique V8 culbuté la place sur un piédestal unique et il n'a pas été facile de lui trouver des concurrentes directes. Surtout en regard de son prix « canon » qui explique sans doute la présence de matériaux bon marché dans l'habitacle et une finition « à l'américaine ».

La Corvette C6 est facturée 63.350 € en boite mécanique comme en automatique.

CHEVROLET Corvette C6 CHEVROLET Corvette C6

Design

Les voitures mythiques ne supportent pas les révolutions. Les stylistes de GM en ont eu bien conscience en redessinant une face avant autour d'optiques exigés par l'arrivée des phares au xénon et une amélioration globale de l'aérodynamique. Nous regretterons pour notre part le fin museau de la C5 et ses phares escamotables d'ailleurs toujours en fonction sur les GTS de course. La poupe, en revanche, a gagné en sportivité tout en donnant visuellement une meilleure assise sur la route grâce à une réduction du porte-à-faux qui ramène la longueur à 4.435m. Les gros feux ronds ont été repris et les quatre échappements agrandis et encadrés par les feux de recul. Evolution agréable, les clenches de portières disgracieuses ont disparu au profit de plaques tactiles dissimulées dans la feuillure de porte (une légère pression suffit pour ouvrir). Rappelons que l'accès à bord et le démarrage ne nécessitent pas de clé.

Pour mieux isoler les occupants des bruits aérodynamiques, le toit amovible en magnésium a gagné en largeur et s'accorde mieux avec les nouvelles vitres latérales plus épaisses. Un vrai « plus » comme nous avons pu le constater pendant notre essai. Dotée de roues plus hautes (18 pouces à l'avant et 19 à l'arrière), la C6 voit ses entrées d'air agrandies au niveau de la jupe avant. Des extracteurs, comme sur l'ancien modèle, se trouvent toujours derrière les roues avant. Revenons un instant aux phares pour signaler que la technologie xénon donne entière satisfaction en feux de croisement, beaucoup moins en position « pleins phares » d'autant qu'aucun réglage en hauteur ne permet d'affiner le faisceau.

Habitacle

Plus haute que la C5, la nouvelle Corvette exige un peu de souplesse pour accéder aux commandes. Classique, la planche de bord utilise un plastique de qualité moyenne tandis que la large console centrale a droit à de l'aluminium anodisé si fin et souple qu'on a l'impression d'avoir affaire à du plastique.

Devant les yeux du conducteur ont été rassemblés 6 cadrans dont deux principaux dédiés au compte-tours (zone rouge 6500 tours) et au compteur gradué de 20 en 20 jusqu'à 300 km/h. Pour ne pas quitter la route des yeux, le pilote peut faire appel au « Head-up Display », traduisez l'affichage tête haute. Ce procédé holographique intelligent monté cette fois en série projette les principales infos dans le champ de vision du conducteur. Un bouton permet d'accéder à des menus différents et la hauteur d'affichage se règle tout comme l'intensité lumineuse.

Etroits mais ergonomiques et recouverts d'un beau cuir, les sièges calent bien le dos grâce à un support lombaire gonflable et atténuent les effets d'une suspension raide. On ne trouve guère d'espace de rangements dans ce cockpit mesuré mais en se retournant, on a accès directement au coffre de belle capacité, deux trappes à l'extrême arrière permettant d'accéder à des caches pour les objets de valeur.

Malgré l'arrivée prochaine d'une version cabriolet, la Corvette bénéficie d'un toit amovible. Il suffit de débloquer trois fixations (aux deux extrémités du haut du pare-brise et en partie centrale à l'arrière). La manœuvre réclame un peu d'énergie et de doigté surtout si on est seul. Fragile, ce toit trouve sa place dans le coffre sans trop perturber sa contenance. Peu de concurrentes possèdent cet avantage.

Un mot encore sur l'habitacle pour regretter une finition à l'américaine toujours très standardisé et surtout les nombreux bruits de mobilier. Frottements, grincements, craquements se relaient lorsque la voiture aborde pavés urbains et autres mauvais revêtements. Difficile à accepter sur une voiture de sport de ce niveau (notre modèle d'essai quasi neuf affichait 1000 km au compteur !).

Châssis

Plus courte que la C5 mais bénéficiant d'un empattement accru et des montes de pneus supérieures, la nouvelle Chevrolet Corvette C6 offre un meilleur contrôle de caisse. On s'en rend compte sur routes dégradées où les nouvelles suspensions du pack Performance Z51 évitent des corrections au volant. Ce pack se compose d'amortisseurs et ressorts plus durs, de barres stabilisatrices de plus gros diamètres et de grands disques de freins davantage ventilés pour évacuer plus rapidement la chaleur.

Mais tout le monde n'aura pas envie de tester sa Corvette sur un circuit. D'où l'intérêt de faire monter en option (+2550 €) le système Magnetic Selective Ride Control. Non seulement, ce système d'amortissement piloté s'adapte en permanence à l'état du sol mais encore il permet de choisir ses liaisons au sol au travers de deux modes : « tourisme » ou « sport », le premier mode étant censé offrir un confort propice au tourisme tranquille. Confort mou et lénifiant aux dires des confrères qui ont pu tester ce système en Allemagne il y a quelques semaines.

Moteur

Pour rester fidèle au mythe, pas question d'avoir recours à un V10 ou un V12 ni même d'augmenter la puissance à coups de béquilles faciles comme la suralimentation ou le compresseur. Cependant, on peut s'étonner de l'architecture dépassée du V8 toujours associé à une distribution simple à 2 soupapes par cylindres, culbuteurs et arbre à cames central. Pour sortir 404 chevaux à 6000 tours, les ingénieurs se sont contentés de faire grimper la cylindrée de 5.7l à 6l. Pas si mal après tout car les férus de la saga Corvette se souviennent que l'ancienne et fameuse ZR1 des années 90 avait eu recours à une culasse à 32 soupapes et 4 arbres à cames en tête pour atteindre déjà les 400 chevaux.

Reste que malgré l'adaptation de la boite (les 4 premiers rapports ont été rapprochés), l'exploitation sur routes ouvertes de ce V8 longue course apparaît bien aléatoire, les 200 km/h étant franchis avec une aisance stupéfiante alors qu'il reste encore une sacrée réserve sous le pied. Ce vieux V8 se permet sans rechigner de repartir de 1000 tours en 6ème (et 80 km/h) et de ne pas consommer plus de 14 litres aux allures soutenues. En revanche, il est dommage que son bruit si excitant d'habitude n'ait été sacrifié sur l'autel de la dépollution.

Sur la route

Pour s'installer derrière le volant de la Corvette, il faut décomposer. Présenter les fesses d'abord en reculant au dessus de l'étroit siège baquet puis passer les jambes l'une après l'autre. La lourde porte refermée, on se sent un peu à l'étroit dans cet habitacle exigu, d'autant que la première manœuvre consiste à se retourner pour attraper la lointaine ceinture de sécurité. Les premiers contacts sont rudes et donnent le ton. Pédale d'embrayage ferme, commande de boite résistante au verrouillage : cette sportive virile réclame du tonus. Sauf pour lancer le moteur en appuyant simplement sur un bouton poussoir très « tendance » mais inutile. A l'image d'un colosse que l'on vient de réveiller, le gros V8 « Small block » s'ébroue et fait jouer ses culbuteurs. Pas évidente à enclencher du premier coup, la première décolle la C6 tandis que l'affichage « tête haute » vert pomme semble flotter loin devant le pare chocs.

Dès les premiers tours de roues, on prend conscience d'être au volant d'une sportive à grand gabarit qu'il faut garder dans l'œil pour se faufiler en ville. Pas très aisé en raison d'une mauvaise visibilité ¾ arrière. La magie commence lorsque la cadence s'accélère. Seconde, troisième, quatrième, le biceps du bras droit se chauffe au rythme d'une boite toujours aussi récalcitrante. L'affichage indique déjà 160 km/h et il reste deux rapports à passer.

On retiendra de notre essai une absence quasi totale de bruits aérodynamiques (à contrario, le grondement assez décevant du V8 ne faiblit jamais), la souplesse incroyable du moteur qui permet de rouler longtemps sans changer de rapport, l'efficacité du freinage, une direction bien asservie à la vitesse et une tenue de route sans faille bien surveillée par l'électronique. Quand à la formidable puissance mise à la disposition du pilote, elle conforte l'image de la « Vette » et entretient le mythe mais reste parfaitement inexploitable sur routes ouvertes. Presque frustrant.

CHEVROLET Corvette C6 CHEVROLET Corvette C6

Equipements

La suspension sport Z51, la correction active de stabilité, l'anti-patinage, les échappements en acier inoxydable aluminé, le régulateur de vitesse, l'air conditionné bi-zone, l'ouverture des portières main libre, le démarrage et l'arrêt du moteur sans clé, l'assise électrique des sièges baquets en cuir, l'ouverture du capot coffre depuis la planche de bord ou la télécommande, le volant réglable en profondeur (électrique) et en hauteur (manuel), le système antivol et alarme, le contrôle de la pression des pneus, l'antenne radio intégrée, les vitres teintées Solar-ray, les phares au xénon, le panneau de toit amovible en magnésium couleur clair ou en harmonie avec la teinte de la carrosserie, les jantes à 5 branches en aluminium poli et le système audio lecteur CD et MP3 à réglage automatique du volume associé à 7HP Bose.

À retenir

quoteMalgré un petit affadissement de la face avant, la Chevrolet Corvette C6 reste l'objet de culte qu'elle a toujours été aux Etats Unis comme de ce côté-ci de l'Atlantique. En témoignent les signes d'admiration, voire de respect sur notre passage. A ce prix, impossible de trouver aussi séduisant et performant ailleurs. Dès lors, on aurait mauvaise grâce à s'attarder sur l'habitacle peu soigné, la commande de boite récalcitrante et le manque de confort. Un bon achat en tous cas, ne serait-ce qu'à cause d'une valeur de revente élevée.
points fortsSéduction préservée, performances, V8 en pleine santé, comportement routier en progrès, direction précise, toit amovible, grand coffre, affichage tête haute en série, prix compétitif.
points faiblesConfort, habitacle exigu, commande de boite et embrayage durs, bruit moteur décevant, gabarit toujours imposant.

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