Essai MCLAREN Artura

Cédric Pinatel le 09/09/2022

Peut-on rêver d'une authentique supercar sans pour autant passer pour un pollueur égoïste ? Les nouvelles sportives du genre de la McLaren Artura sont là pour entretenir la flamme tout en composant avec les nouvelles contraintes du marché automobile.

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Le rêve devient politiquement correct

Dès 2035, les grands constructeurs automobiles n'auront plus le droit de vendre des voitures équipées d'un moteur thermique. Bien avant cela, les principales villes d'Europe auront probablement mis en place des restrictions pour interdire l'accès de leurs centres aux véhicules les plus polluants. Et les quotas de CO2 soumis aux marques deviennent de plus en plus restrictifs chaque année.

Voilà pourquoi même les spécialistes de la voiture de sport d'exception se tournent vers l'hybride en attendant de maîtriser la technologie 100% électrique. De manière quasiment simultanée avec la Ferrari 296 GTB hybride rechargeable, McLaren lance sur le marché sa toute première auto de grande série à brancher. Présentant un style extérieur assez proche de celui de l'ancienne 570S à moteur V8, l'Artura inaugure une plateforme technique entièrement nouvelle. Grâce à son moteur électrique de 95 chevaux alimenté par des batteries de 7,4 kWh, elle revendique une consommation mixte de 4,6 litres aux 100 kilomètres et seulement 104 g/km de CO2 (battant très largement la Ferrari et ses 149 g/km, frappée elle d'un malus écologique). Oui, cette nouvelle voiture de sport de 680 chevaux consommerait et polluerait moins qu'une modeste Toyota Aygo X de 70 chevaux ou qu'une Renault Twingo de 65 chevaux !

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Une véritable hybride rechargeable

Certes, ces chiffres d'homologation particulièrement bas doivent beaucoup à nos normes si avantageuses pour les véhicules hybrides rechargeables, que l'Union Européenne compte d'ailleurs modifier par souci de cohérence. Mais volant en main, la McLaren Artura peut réellement se conduire en ville sans dépenser la moindre goutte de carburant. Une fois installé derrière le joli petit volant de cette machine à la silhouette de supercar, nécessitant toujours quelques contorsions malgré une nouvelle monocoque carbone optimisée pour la praticité, appuyer sur le bouton de démarrage ne fait pas aboyer le moteur à explosion. A condition de ne pas dépasser les 130 km/h et de se contenter de performances de citadine modeste, on conduit sans le moindre bruit en toute tranquillité. McLaren annonce à ce sujet une autonomie de 31 kilomètres en version électrique, un chiffre nous paraissant crédible après nos 28 kilomètres parcourus sans utiliser d'énergie fossile entre Marbella et le périphérique espagnol. Alors, oui, vraiment, cette McLaren peut se montrer vertueuse si vous comptez sérieusement l'utiliser dans la vie de tous les jours en la rechargeant après chaque petit trajet. Comptez 2h30 pour repasser de 0 à 80% de charge sur une prise classique 220 volts.

Une vraie McLaren quand le V6 tourne

Mais vous auriez tort de ne pas expérimenter tout ce que cette Artura peut faire dès que vous réveillez le V6 bi-turbo de 3,0 litres installé en position centrale arrière, un tout nouveau moteur développant 585 chevaux (et 680 chevaux une fois combiné avec le moteur électrique positionné à la sortie de son vilebrequin). Pour cela, il suffit de basculer le sélecteur du groupe motopropulseur -situé à la droite du volant sur la casquette du combiné d'instrumentation- dans une autre position que « Electric » (Confort, Sport et Track). Confortable malgré des suspensions pilotées classiques dépourvue de l'ingénieux système hydraulique interconnecté de sa grande sœur la 720S, l'Artura révèle alors son vrai caractère mécanique. Accouplé à une boîte à double embrayage à huit rapports entièrement nouvelle elle aussi, ce V6 sonne un peu comme celui de la Ford GT avec un timbre rauque et guttural, loin des aigus chantants de la 296 GTB (il prend pourtant 8 500 tours /minute comme celui de la Ferrari)

Et tout de suite, on retrouve les sensations de pilotage typiques d'une McLaren : malgré un tempérament plus lissé par rapport à l'ancienne 570S, la fameuse direction à assistance hydraulique demeure bien plus communicative et franche que celle d'une Audi R8 ou d'une Lamborghini Huracan. Même remarque pour la pédale de frein -dépourvue de fonction régénérative- dont l'attaque très dure donne immédiatement envie de l'écraser à très haute vitesse. Avec le groupe motopropulseur réglé en mode Track et l'amortissement en mode Sport, le rythme devient suffocant sur les routes d'Andalousie menant au circuit d'Ascari. Aidée par les P-Zero Corsa optionnels, l'Artura déborde de motricité et cogne comme une vraie supercar (0 à 200 km/h en 8,3 secondes, mieux qu'une Lamborghini Aventador Ultimae de 780 chevaux). Le travail du moteur électrique à bas régime brille par sa discrétion et la belle synergie de l'ensemble nous fait totalement oublier qu'on conduit une machine hybride rechargeable. Il faut dire que malgré les 130 kilos ajoutés au châssis par l'électrification, l'Artura ne pèse que 1498 kg à sec, c'est à dire moins que toutes ses rivales directes. Voilà aussi pourquoi le train avant combat le sous-virage avec un acharnement étonnant malgré l'absence de roues arrière directrices. Faut-il y voir l'action du tout nouveau différentiel arrière, piloté électroniquement et doté d'une fonction « torque vectoring » ? Une fois arrivés au circuit d'Ascari en tout cas, on se réjouit d'avoir pris autant de plaisir sur la route.

Et sur circuit ?

Lancée sur circuit, l'Artura offre les mêmes sensations avec un très haut niveau de motricité et de grip. Sous-vireuse à la limite, l'Anglaise met en confiance et invite naturellement à réduire et supprimer les aides à la conduite, même sur un tracé aussi exigeant que la piste d'Ascari. Très stable et verrouillée à notre rythme, elle nous a donné l'impression de pouvoir aller beaucoup plus loin dans l'attaque. Malheureusement, nous n'en verrons pas plus : au moment de notre seconde série de tours où nous devions pousser davantage et supprimer les aides à la conduite, un incident en piste sur un autre exemplaire nous a obligé à rejoindre la voie des stands. Dommage, car l'Artura semblait douée pour chasser le chrono sur circuit. Les ingénieurs de la marque nous assurent d'ailleurs que les batteries du moteur électrique sont conçues pour tenir 10 tours d'affilée d'un grand circuit comme celui de Nardo avant de commencer à perdre en performance. Capable de tenir sur un track-day complet selon les communicants de la marque, l'Artura n'a en tout cas jamais donné l'impression de réduire ses performances pendant notre essai même sur la route une fois les batteries vides (elles se rechargent toutes seules via le frein moteur). Notez qu'un problème de surchauffe sur l'un des modèles d'essai pendant notre sessions sur circuit, qui a entraîné l'arrêt des essais, serait dû à un petit souci lié aux exemplaires de pré-série. McLaren promet qu'ils ne concerneront pas les autos vendues aux clients (garanties 5 ans ou 75 000 kilomètres).

Reste le problème de la concurrence : à 235 548 €, cette McLaren Artura coûte 35 000 € de moins que la nouvelle Ferrari 296 GTB encore plus puissante (830 chevaux). Mais les Lamborghini Huracan Evo, Audi R8 Performance, Maserati MC20 et autres Porsche 911 Turbo S sont toutes moins chères (sauf si l'on ajoute le malus de 40 000 € auquel échappe totalement l'Artura). Et chez McLaren, la très explosive 720S de 720 chevaux ne coûte que 15 000€ de plus. Pas facile de choisir sa sportive d'exception avec une offre aussi riche...

À retenir

quoteL'Artura reste-t-elle une vraie McLaren malgré toute la vertu inscrite sur sa fiche technique de voiture hybride rechargeable ? Oui, assurément. La pureté de ses sensations de pilotage représente même son meilleur atout par rapport à ses concurrentes, dont certaines profitent de mécaniques plus sensationnelles ou d'une polyvalence encore supérieure.
points fortsVraie capacité de roulage en électrique, performances, efficacité dynamique
points faiblesPrix, caractère moteur pas inoubliable
16.1

20
Les chiffres
Prix 2022 : 235548 €
Puissance : 680 ch
0 à 100km/h : 3s
Conso mixte : 4.6 l/100 km
Emission de CO2 : 104 g/km
Notre avis
Note de coeur : 16/20
Agrément de conduite
  • Accélération
  • Reprises
  • Direction
  • Agilité du châssis
  • Position de conduite
  • Commande de boîte
  • Etagement de la boîte
:
20/20
Sécurité active et passive
  • Adhérence
  • Freinage
  • Equipements de
    sécurité
:
17/20
Confort et vie à bord
  • Habitabilité
  • Volume du coffre
  • Visibilité
  • Espaces de rangement
  • Confort de suspension
  • Confort des sièges
  • Insonorisation
  • Qualité (matériaux, assemblage, finitions)
:
11/20
Budget
  • Rapport prix/prestations
  • Tarif des options
  • Consommation
:
9/20

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