Saga Ford Mustang

La Mustang, née en 1964, fait encore rêver quarante années après sa présentation.

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FORD MUSTANG Shelby

Christian Descombes le 26/04/2004

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La Mustang mordue par un cobra

Les plus désirables des Mustang sont bien sûr les plus puissantes et les plus exclusives. Celles construites par Carroll Shelby, le père des Cobra, qui leur donna leurs lettres de noblesse.

Tout auréolé de son aventure avec les Cobra à moteur Ford, Carroll Shelby semblait tout désigné pour donner à la Mustang le prestige sportif qui lui manquait. Ce fut chose faite en 1965.

Carroll Shelby 1963
Carroll Shelby 1963 D.R
Carroll Shelby et John Force au volant d'une Shelby GT500 KR lors de la célébration du 40ème anniver
Carroll Shelby et John Force au volant d'une Shelby GT500 KR lors de la célébration du 40ème anniver D.R

Un Texan providentiel

Né à Leesburg (Texas) le 11 janvier 1922, Carroll Shelby s’était engagé dans le Training Command de l’US Air Force en 1940 pour devenir pilote de Forteresse volante. Après la guerre, il fonda une entreprise de transports, puis se lança dans l’élevage des poulets en 1952 où il fit fortune mais se retrouva ruiné suite à une épidémie. Il vécut ensuite de ses talents de pilote automobile et courut notamment sur Maserati pour John Edgar. Il connut la gloire en 1959 au volant d’une Aston Martin en remportant les 24 Heures du Mans, associé à Roy Salvadori. Il avait dû mettre un terme à sa carrière de pilote suite à de sérieux problèmes cardiaques à la fin de la saison 1960. Il décida alors de se lancer dans la construction de voitures de sport, une activité moins physique qui lui permettrait de rester en contact avec le monde de la compétition en confiant ses bolides à d’autres qui auraient le coeur plus solide. Son concept était simple et pas franchement originale : un gros V8 américain fiable et puissant dans un châssis léger. Beaucoup y avaient pensé avant lui sans vraiment trouver le parfait équilibre entre la puissance d’une lourde mécanique et la résistance d’un frêle châssis tubulaire.

Un écrin pour le V8 Ford

Carroll Shelby avait finalement choisi l’AC Ace qu’il connaissait bien comme base pour sa future sportive. La petite firme britannique en difficulté à l’époque s’engagea aussitôt à fournir les châssis qu’il désirait à l’Américain. Restait à trouver le moteur. Shelby réussit à convaincre Ford de lui vendre son nouveau V8 3,6 litres Challenger, qui inaugurait un nouveau procédé de fonderie et dont le poids et l’encombrement étaient presque identiques au 6 cylindres de la Ford Zephyr qui équipait justement l’AC. Malheureusement, sa puissance de 143 ch n’était guère supérieure non plus à celle de la Zephyr. Carroll Shelby tombait à pic. Ford vit dans le pilote texan une bonne opportunité de faire valoir ses ambitions en sport automobile dans le cadre du fameux projet Total Performance que venait de mettre sur pied Lee Iacocca. Au lieu de lui livrer les Challenger 3,6 litres attendus, on lui envoya une version haute performance du moteur poussé à 4,2 litres. La surprise était de taille et le gain de puissance également puisque pour le même poids Shelby disposait désormais de 260 ch !

Shelby Cobra 1963
Shelby Cobra 1963 D.R
Cobra Daytona 1965
Cobra Daytona 1965 D.R

Le mythe Cobra

Les Cobra construites en série se firent remarquer sous leur forme 260 puis 289 à partir de 1962 mais c’est fin 1964 que la Cobra devint mythique sous sa forme 427, équipée du V8 7 litres de 425 ch. Avec un rapport poids/puissance proche de 2 kg/ch, elles devinrent l’étalon de référence de la production mondiale en matière d’accélérations. La Mustang était en production depuis seulement 6 mois. Shelby avait été chargé de représenter Ford dans le championnat du monde des voitures de sport qui se courait en GT (Groupe 3) en 1965, face aux Ferrari GTO. Son coupé Cobra Daytona l’emporta sans gagner une seule course. Pendant ce temps, les Ford GT40 officielles à moteur central étaient affétées pour la catégorie Sport Prototypes qui allait reprendre en 1966. Shelby perdrait la représentation de Ford en championnat du monde. En lui confiant la tâche de concocter une Mustang sauce Cobra pour la compétition en SCCA, Ford lui offrait une piètre consolation. Probablement que les crédits débloqués pour arriver à construire les 100 exemplaires nécessaires à l’homologation avaient été largement calculés. Shelby releva le défi.

Economique et pragmatique

Pour répondre à l’homologation, Shelby avait le choix, s’attaquer aux suspensions ou au moteur. Le règlement n’autorisait pas les deux modifications simultanées. Le Texan connaissait bien les qualités du V8 289 qu’il utilisait dans ses Cobra et décida de le conserver. En revanche, il lui semblait indispensable de modifier les suspensions arrière et l’essieu rigide de la Mustang, hérités de la Falcon. Ford décida de son côté d’élaborer une suspension à roues arrière indépendantes, inspirée de celle de la Corvette. On confronta les deux réalisations. Les modifications apportées par Shelby, entièrement pragmatiques, s’avérèrent largement aussi convaincantes que la solution sophistiquée mise au point avec l’aide d’un ordinateur par les ingénieurs de Ford. Elles étaient surtout bien moins chères à produire. Cent coupés fastback à moteur V8 289, la base choisie par Shelby, furent livrés à Venice dans des hangars de l’aéroport attenants aux ateliers de Shelby pour y être transformés.

1ère production de Shelby Mustang GT 350.
1ère production de Shelby Mustang GT 350. D.R
1ère production de Shelby Mustang GT 350.
1ère production de Shelby Mustang GT 350. D.R

Cent voitures en 5 mois

La suspension était abaissée, les pivots réimplantés et surtout les ressorts dément renforcés et une barre stabilisatrice ajoutée. On greffait également des bras de guidage du train arrière longitudinaux et des amortisseurs Koni. Une traverse améliorant la rigidité, éprouvée sur les Falcon envoyées au Monte-Carlo, était ajoutée dans le compartiment moteur. Le moteur était également préparé avec des conduits d’admission et d’échappement agrandis et polis et le V8 recevait un carburateur quadruple corps Holley monté sur une pipe d’admission Shelby en alliage léger. La puissance passait à 306 ch à 6000 tr/min. En novembre 1964 Shelby alignait les cents voitures d’homologation devant les commissaires du SCCA. Il lui avait fallu 5 mois pour les construire. En plus des cents modèles d’homologation, Shelby réalisa 15 versions Racing allégées et au moteur poussé.

Shelby GT 350 1967
Shelby GT 350 1967 D.R
Shelby GT 350 1967
Shelby GT 350 1967 D.R

La Gordini américaine

La Mustang Shelby fut baptisée GT 350, ce qui était supérieur à 250 GT, et mise en vente pour 4 547 $, 2000 de plus que la version de base. La GT 350 était nettement moins confortable que la Mustang de série, mais bénéficiait de quelques options comme la boîte manuelle à 4 vitesses, le différentiel à glissement limité et des freins à disque à l’avant. Sans parler d’un compte-tours style compteur de moto implanté au beau milieu du rebord supérieur de la planche de bord. Toutes étaient Wimbledon white avec deux larges bandes bleues longitudinales. L’équivalent d’une Gordini américaine. 462 unités supplémentaires vinrent s’ajouter aux 100 exemplaires d’homologation et aux 15 versions racing. La GT 350 1966 se civilisait avec un échappement prolongé jusqu’à l’arrière, le différentiel à glissement limité et les suspensions Koni en option. On pouvait aussi obtenir une transmission automatique et le nuancer était élargi. Il se vendit 1370 GT 350 millésime 1966, soit plus du double des modèles 1965, auxquels on peut ajouter les 1000 exemplaires de la 35 GTH noirs à bandes dorées commandés par la société de location Hertz qui voulait redorer son blason et rajeunir sa clientèle en lui offrant cette bombe.

Shelby GT 350 1965
Shelby GT 350 1965 D.R
Shelby GTH 350 1966
Shelby GTH 350 1966 D.R

En 1967, la Shelby fut reconduite avec la nouvelle carrosserie et une proposition GT 500 équipée du V8 428 de 335 ch qui rentrait désormais sous le capot. Les 80 kg supplémentaires qui pesaient sur le train avant n’arrangeaient pas la tenue de route, mais la nouvelle Shelby offrait plus de confort et d’équipements et dépassa les 2000 unités vendues. Le film Gone in sixty seconds avec Nicholas Cage donne le rôle principal à Eleanor, une GT 500 de 1967. Moins mémorable toutefois que la Mustang de Frank Bullitt alias Steve McQueen. La Shelby fut à nouveau reconduite sous la troisième forme de carrosserie de 1970 amis, comme les autres Mustang, elle avait perdu sa fraîcheur et sa saveur. Shelby avait cessé de faire courir ses Mustang à la fin de la saison 1966, il n’était plus qu’un faire-valoir commercial.

Shelby GT 500 1967
Shelby GT 500 1967 D.R
Shelby GT 500 1969
Shelby GT 500 1969 D.R
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