Histoire : La compétition automobile des origines aux années 80

le 05/08/2005

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Les premiers monstres...

Au début, il n'y avait pas de voitures de course... mais seulement des voitures, dont certaines faisaient des courses....

C'est dans cette situation qu'eut lieu la première course automobile du monde, en 1895, de Paris à Bordeaux et retour. La manifestation se développa à partir de la course Paris-Rouen de l'année précédente, financée par le journal parisien Le Petit Journal et créée afin d'améliorer la confiance dans les toutes nouvelles voitures à moteur. Ce premier événement sportif automobile se développa bientôt en course ouverte à tous (dés que les officiels qui donnaient le départ furent hors de vue), ce qui contamina tous les participants et quelques spectateurs de la fièvre de la course. presque tout de suite, on créa l'Automobile Club de France pour organiser les courses à venir.

Après un défilé sur le pavé de Versailles, vingt-deux voitures démarrèrent sur un parcours de 1 171 km ; quinze voitures à essence, six à vapeur et un véhicule électrique étaient en compétition, mais ce fut Émile Levassor qui arriva le premier dans sa Panhard Levassor, moteur Daimler de 1200 cc et 3,5 cv.


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A 3 h 30, le matin suivant, il arriva à Ruffec, à 403 km du point de départ où il devait donner le relais à son coéquipier ; mais il était tellement en avance par rapport à l'heure prévue de son arrivée que ce dernier dormait encore, et Levassor préféra continuer plutôt que de compromettre sa victoire. Il parvint à Bordeaux à 10 h 40, presque quatre heures avant son rival le plus proche, tourna et prit le chemin du retour. Lorsqu'il atteignit à nouveau Ruffec, son coéquipier, gêné, l'attendait : mais Levassor était alors jaloux, non seulement de sa victoire, mais aussi du fait qu'il l'avait remportée seul.

C'est pourquoi il refusa le relais et continua jusqu'à la fin du parcours où il parvint presque six heures avant la voiture suivante, une Peugeot. Levassor avait dirigé cette voiture aux pneus à bandages pleins pendant l'incroyable durée de 48 h 48' - son arrét le plus long ayant été de vingt-deux minutes - et il avait réalisé une moyenne de presque 24 km/h. Il n'y eut que sept autres voitures à essence et une à vapeur qui terminèrent la course. Son exploit enflamma l'imagination d'automobilistes du monde entier.

Des courses entre Paris et d'autres villes - d'abord en France et plus tard dans d'autres pays - furent bientôt établies comme la part principale du sport automobile. Des automobiles à essence, à vapeur, électriques, couraient d'abord ensemble. mais il devint bientôt évident que les voitures à essence étaient les mieux adaptées et que les Panhard, pour qui Levassor avait élaboré ce qui devait être plus tard la disposition traditionnelle du moteur à l'avant, étaient les plus réussies.

Panhard fut d'ailleurs réellement la marque dominante pendant les huit premières années de course automobile. Inévitablement, dans la lutte pour la victoire, les voitures augmentèrent en taille et en puissance.

En 1898, bien qu'elles courussent encore toutes ensemble, les voitures étaient distinguées en trois catégories -

- lourdes ;

- légères ;

- voiturettes ou ultra-légéres.

L'idée de la catégorie des voiturettes était d'encourager les propriétaires les moins riches et de leur donner des chances de récompenses dans des manifestations dont on savait avec une quasi-certitude qu'elles allaient être remportées par les heureux propriétaires de Panhard ou de Mors.

Ce but a été poursuivi jusqu'à maintenant, bien que chaque nouvelle Formule peu coûteuse finisse habituellement par être dominée par des concurrents aux plus grands moyens. La puissance augmenta, mais non le poids car les châssis étaient nus et les voitures avaient des trous creusés partout où on le pouvait afin de les alléger et d'augmenter le rapport poids-puissance.

Dans la course Paris-Bordeaux de 1895. la Panhard de Levassor avait un moteur 1,2 L de 3,5 cv et obtint une moyenne de 24 km/h. En 1899, la Canstatt-Daimler. l'une des premières voitures conçues pour la compétition automobile, avait un moteur de 5.5 L donnant 25 cv. La course Paris-Vienne de 1902 fut gagnée par une Panhard de 13,7 L de presque 90 cv à une vitesse moyenne de 62 km/h. Le désastre était inévitable et survint en 1903 lors de la course Paris-Madrid qui fut plus tard surnommée "course de la mort".


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L'augmentation de la vitesse et le dangereux affaiblissement des voitures à la recherche de légèreté n'étaient pas seuls responsables ; les foules de week-ends ignoraient tous les avertissements et grouillaient sur les routes et les pilotes étaient tellement aveuglés par la poussière d'été soulevée par les autres voitures, que, par moments, certains se dirigeaient uniquement grâce à des aperçus des sommets des poteaux télégraphiques.

On n'est pas sûr que l'accident fut mortel, mais on pense qu'une vingtaine de concurrents et de spectateurs trouvèrent la mort avant que les autorités françaises n'arrêtent les coureurs à Bordeaux et ordonnent que les voitures soient ramenées par train à Paris.

Après cela, les voitures furent généralement séparées par catégories afin d'éviter les débordements de foule. Les courses durent alors avoir lieu sur des circuits fermés, menant éventuellement à des circuits permanents comme Brooklands en Grande-Bretagne (ouvert en 1907) et Indianapolis aux États-Unis (ouvert en 1911). Mais les voitures ne cessaient d'augmenter.

Lorsque les Français organisèrent la première course de Grand Prix sur un circuit au Mans en 1906, des modèles spécialisés pour la course, plus longs, plus bas et plus puissants que les modèles de production courante étaient esssentiels au succès de la course. Il y avait un poids maximum limite de 1000 kg (19 CWT) pour cette course, mais la Renault qui gagna avait un moteur de 12,8 L, donnant 105 cv et eut une moyenne de 100 krn/h.

Pour la manifestation de Dieppe en 1907, la restriction de poids fut abandonnée au profit d'une règle limitant la consommation d'essence à 30L par cent kilomètres. Mais la Fiat victorieuse de Felice Nazzaro avait un moteur de 15,26 L, et sa vitesse était de 112,976 krn/h. Une autre autre voiture était proche de 20 L. Alors, en 1908, les autorités du Grand Prix essayèrent de réduire la section des pistons. Un moteur quatre cylindres était limité à un alésage de 155 mm, un moteur six cylindres à 127 mm ; mais le résultat fut que les fabricants rallongèrent la course du piston et Christian Lautenschlager gagna dans une Mercédès 12,8 L à 110 km/h. Les brûleurs en platine des premières voitures furent remplacés par l'allumage magnéto.

On avait créé des soupapes d'admission à commande mécanique ainsi que des boîtes à quatre vitesses et pourtant les régimes étaient encore relativement faibles, de l'ordre de 1200 à 1400 tr/mn. La puissance brute était tout. Il n'y eut pas de Grand Prix en 1909, 1910 et 1911.

Les fabricants reculaient à cause de l'augmentation du prix des courses et parce que les fabricants français boudaient la victoire Mercedes ; mais à Daytona aux États-Unis, Barney Oldfield et Bob Burman améliorèrent les records de 208 à 224 km/h avec la Blitzen Benz 21 L. En 1912, Le Grand Prix de FRANCE eut à nouveau lieu, sans aucune restriction, excepté l'obligation d'une largeur minimum de 1,75 m.

Il y avait des énormes Lorraine Dietrich à transmission par chaîne dont la cylindrée était de 15 L et des Fiat de 14 L, mais le monde de l'automobile devait recevoir un grand choc. La course fut gagnée par Georges Boillot sur une Peugeot de 7,6L seulement.


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Il réalisa une moyenne de 109,50 km/h et vainquit une Fiat qui avait presque deux fois la taille de la Peugeot à la seconde place. Une révolution avait eu lieu. Son auteur était un Suisse de 26 ans, Ernest Henry, qui avait élaboré pour Peugeot un moteur qui tournait à 2 200 tr/mn. Il possédait un bloc de quatre cylindres comprenant la culasse et quatre soupapes par cylindre actionnées par un double arbre à cames en tête et la voiture avait une performance de 160 krn/h. Un événement extraordinaire avait eu lieu dans la course automobile. La force brute et la taille n'étaient plus d'une importance capitale. L'efficacité de la conception était en train de les supplanter.

En 1913, Peugeot confirma sa supériorité. Cette année-là, la limite de poids était de 800 à 1 100 kg et la limite de consommation d'essence de 20 L par cent kilomètres. Boillot gagna à nouveau au volant d'une nouvelle voiture conçue par Henry, de 5,8 L seulement et à une moyenne de 115,4 km/h.

En 1914, pour la première fois, on décida une restriction sur la cylindrée des moteurs à peu près suivie en général depuis ce temps dans la course automobile. La limite était de 4,5 L. Les monstres de 15 et 18 L étaient morts. Les Peugeot étaient bien sûr les favorites et avaient des carrosseries carénées et des freins sur quatre roues (comme les Fiat et les Delage). Mais, avec les rumeurs de menaces de guerre, la France devait subir une humiliation. Les cinq voitures Mercedes possédaient seulement des freins sur deux roues, mais aussi des moteurs fabriqués méticuleusement avec quatre soupapes et trois bougies par cylindre ; elles donnaient 115 cv à 2 800 tr/mn et étaient capables de 160 km/h. Et Mercedes apporta quelque chose de nouveau à la course : des tactiques d'équipe et un plan stratégique.

Boillot conduisait bien et mena la course sur presque toute la distance, mais fut si pressé par les poursuivants qu'il fit exploser son moteur et Mercedes prit les trois premières places. Pour donner la mesure du changement qui avait eu lieu en six ans, on peut citer ceci : lorsque Lautenschlager avait gagné le Grand Prix de 1908, il avait réalisé une moyenne de 110,25 km/h dans une voiture 12,8 L.

Lors d'une course plus difficile et plus réglementée en 1914, il eut une moyenne de 101,36 km/h dans une voiture d'un peu plus d'un tiers de cette cylindrée. Mais la guerre survint et les courses cessèrent. Une époque s'achevait juste au moment où un nouvel âge de sophistication commençait.


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L'époque du compresseur

On diminua encore la capacité en litres lorsque les courses reprirent après la guerre ; en 1921, la limite était de 3L.

Ernest Henry garda son influence sur la construction, ayant créé des voitures à huit cylindres à double arbre à came en tête pour Ballot, une société française qui fit une incursion brève mais intéressante dans la course automobile. Les Ballot arrivèrent seconde et troisième dans le Grand Prix de FRANCE de 1921, bien que le vainqueur surprise fût une Duesenberg huit cylindres de 115 cv ; cette dernière, comme son pilote Jimmy Murphy, venait des circuits américains.

Sa particularité venait de ce qu'elle possédait un système hydraulique de freins sur quatre roues, le liquide de frein étant composé d'eau avec de la glycérine afin d'éviter le gel. En 1922, une autre nouvelle formule limita les moteurs à 2 L.

Fiat domina d'abord avec une voiture six cylindres, ce qui poussa Louis Coatalen à prendre Bertarione à Fiat et Henry, de la société Ballot, à concevoir des modèles six cylindres pour Sunbeam. L'une d'entre elles, conduite par Henry (plus tard Sir Henry) Segrave gagna le Grand Prix de FRANCE de 1923 à Tours ; c'était la première victoire en Grand Prix pour un pilote britannique dans une voiture britannique.

Pendant ce temps, Fiat avait fait des expériences sur les compresseurs. Ils n'étaient pas les premiers à le faire, mais ils furent les premiers à remporter un Grand Prix avec une voiture à compresseur.


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Au départ, ils utilisèrent une turbine à pales du type Wittig qui ne fut pas un succès, puis y substituèrent une autre du type Roots ; Carlo Salamano gagna le Grand Prix d'EUROPE à Monza et la voie de la conception des voitures de course était désormais changée. Bientôt, le compresseur se répandait partout.

En 1924 et en 1925, Alfa Roméo domina avec la P 2 conçue par Vittorio Jano, un autre ancien de chez Fiat. Elle possédait un moteur huit cylindres à compresseur de 140 cv à 5 400 tr/mn, fonctionnant avec un mélange d'essence et d'alcool éthylique avec un peu d'éther. Ettore Bugatti, lui, était contre le compresseur. Son type 35, une voiture huit cylindres, à trois soupapes par cylindre et double carburateur, était méticuleusement construite et la première de ses conceptions célèbres.

Mais, en 1926, même lui fut obligé de capituler et l'emploi des compresseurs devint presque universel. Le parfait perfectionniste italien du moteur céda lorsqu'une nouvelle formule abaissa à nouveau la cylindrée à 1,5 L, faisant presque des voitures de Grand Prix une catégorie de voiturettes.

La décision fut prise parce que les courses étaient devenues trop coûteuses pour les fabricants, et trop rapides pour les autorités. Avec cette nouvelle formule, les Bugatti rivalisèrent avec la française Delage, conçue par Albert Lory. Celle-ci avait un moteur huit cylindres à compresseur avec un train complexe de plus de vingt engrenages sur roulements à bille et donnait 170 cv à 8 000 tr/mn. Les membres du public qui préféraient observer des voitures plus massives tournèrent les yeux vers Brooklands, où les voitures étaient groupées sommairement par vitesse et ils purent voir des monstres comme les Chitty-Chitty-Bang-Bangs, aux moteurs d'avions de 14 à 23 L de la première guerre mondiale, conduites par le Comte Louis Zborowski.

Au Mans, se trouvaient également les créations foudroyantes de W.O. Bentley pour la course annuelle des 24 heures des voitures de sport et de tourisme instaurée en 1923. Les voitures Bentley gagnèrent la course en 1927 et les trois années suivantes, la cylindrée du moteur passant de 3 L à 6,5 L.

Mais la course dont on devait parler le plus fut celle de 1927, lorsque Sammy Davis et «Doc» Benja Field réussirent à amener « le vieux numéro 7 » à la victoire après qu'elle eut été disloquée dans un accident terrible. La course de Grand Prix était devenue si réglementée qu'inévitablement le balancier retomba. En 1928, les seules restrictions étaient celles de poids et à partir de 1930, il n'y eut plus aucune limite et la cylindrée commença à augmenter.

Les voitures ordinaires étaient interdites depuis 1925, mais elles continuèrent à être biplaces jusqu'en 1927, date à laquelle les monoplaces furent autorisées Elle était inhabituelle en ceci que le différentiel se trouvait entre les jambes du pilote et que l'arbre de transmission était en forme de V.

La cylindrée passa de 2,9 L à 3,2 L puis à 3,8 L ; elle était capable de plus de 224 krn/h et entre les mains de Tazio Nuvalori et Rudolf Caracciola était presque imbattable. Finalement, une nouvelle formule fut élaborée et introduite en 1934. On l'appelait Formule 750, car sa restriction majeure était que le poids des voitures ne dépasse pas 750 kg. L'ardeur nationaliste était responsable.

Un prestige international venait des victoires de courses automobiles et Hitler voulait ce prestige pour l'Allemagne. Il offrit de grosses primes aux fabricants de voitures allemandes qui vaincraient leurs concurrents étrangers et deux sociétés rivales allemandes remplirent cette mission. C'était Mercédès et Auto-Union, une nouvelle firme qui était le consortium de quatre fabricants différents; les subventions d'Hitler les aidèrent à utiliser des alliages légers permettant des moteurs puissants.

La P. Wagen d'Auto-Union était une voiture révolutionnaire. Ferdinand Porsche. qui la créa, conçut l'idée de placer le moteur derrière le pilote pour reporter le poids sur les roues arrière. Il anticipa alors de vingt ans une règle de la course automobile. Le moteur original était un V 16 de 4,3 L avec un seul compresseur à l'arrière. La voiture était rapide mais son volume imposant et la concentration du poids sur les roues arrière la rendaient très délicate à conduire.


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Sa rivale, la Mercédès W 25, créée par Hans Nibel et Max Wagner, était plus conventionnelle avec un moteur de huit cylindres en ligne, de 3,3 L qui fut bientôt porté à près de 4 L pour développer une puissance de 430 cv à 5 800 tr/mn. La bataille entre les deux fabricants devait enflammer les circuits européens ; les deux équipes établissaient leur domination sur les autres pays et combattaient entre elles pour la suprématie.

Varzi, Stuck et Rosemeyer pour Auto-Union, Caracciola, Fagioli et von Brauchitsch pour Mercédès, étaient les héros de tous les Allemands et les autres pays les observaient avec respect. En 1935, Mercédès eut le dessus. En 1936, les moteurs Auto-Union montèrent à 6 L (520 cv) et les Mercédès à 4,7 L (495 cv). Auto-Union élargit l'empattement, Mercédès le diminua ; ce fut une erreur et " l'année d'Auto-Union ".

En 1937, Mercédès revint avec la W 125 au moteur 5,6 Lde huit cylindres d'une puissance de 640 cv à 5 800 tr/mn et avec une vitesse de près de 320 km/h. Les problèmes de conduite causés par l'empattement diminué de l'année précédente étaient maitrisés et elle fut probablement la voiture de course la plus puissante jamais construite ; mais lorsque la voiture Auto-Union monta à 6,1 L, elles furent à peu près égales.

Les autorités s'alarmèrent, et pour 1938, exigèrent une formule de 3 L (ou 4,5 L sans compresseur ce qui était absurde puisque toutes les voitures en avaient) et un poids minimum de 850 kg.

Auto-Union présenta une V 12 d'une puissance de 400 cv à 7 000 tr/mn, allongea l'avant et recula le pilote dans la voiture afin d'améliorer son maniement, Mercédès les égala avec une V12 de même puissance. La compétition de Grand Prix était devenue une course à deux chevaux. Les constructeurs d'autres pays, incapables de rivaliser avec l'argent des firmes allemandes, commencèrent à s'intéresser aux manifestations de petites cylindrées. En Italie, Alfa Roméo produisit le type 158, avec -un moteur 1,5 L, de huit cylindres à compresseur, qui était à la base la moitié de leur moteur de seize cylindres de Grand Prix. En Grande-Bretagne, Raymond Mays et Peter Berthon élaborèrent l'Era, version à compresseur de la Riley 1,5 L de six cylindres.

Ces deux voitures devaient avoir une grande influence sur la course automobile. La suprématie britannique Pour les premières courses d'après-guerre, on ressortit de leurs garages les voitures d'avant-guerre. Une nouvelle formule, introduite en 1947, limita les moteurs à 1,5 L avec compresseur ou à 4,5 L sans, et ce fut l'Alfa Roméo 158 d'avant-guerre, d'une puissance de 380 cv, qui domina la course, Lorsque le Championnat du monde fut créé en 1950, le premier gagnant fut Giuseppe Farina, premier pilote italien de l'équipe Alfa Roméo. Mais l'ère du compresseur allait s'achever.


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Ils étaient coûteux en carburant, ce qui faisait perdre du temps pour le ravitaillement aux arrêts dans les stands, et la recherche sans fin de vitesses supérieures à partir de petits moteurs y créait de fortes contraintes internes. Les constructeurs commençaient à rêver de moteurs simples, non poussés, sans compresseur et respectant la limite 4,5 L. Anthony Lago en produisit un dans la Lago Talbot, mais ce fut Enzo Ferrari qui devait donner à la conception des voitures de course un autre changement de direction. Avant la guerre, Ferrari avait créé la Scuderia Ferrari, département de course d'Alfa Roméo. Il engagea Aurelio Lampredi pour concevoir un moteur sans compresseur.

La Ferrari qui en résulta fit ses débuts au Grand Prix de BELGIQUE de 1950, avec un moteur de 3,3 L. Au cours des mois, il fut porté à 4,5 L, développant une puissance de 380 cv à 7 400 tr/mn. Une lutte avec les Alfa en découla, mais au Grand Prix d'ANGLETERRE à

Silverstone en 1951, Ferrari vit sa nouvelle voiture pilotée par Gonzalès, vaincre les voitures qu'il faisait courir d'habitude. Le grand espoir de l'Angleterre, la B.R.M. V 16 à compresseur, construite par l'équipe ERA de Mays et Berthon grâce au soutien d'un certain nombre de sociétés patriotes et même avec l'argent du public, n'était pas fiable et la course en Formule I se développa au profit de Ferrari.

Il y avait si peu de concurrence pour les Ferrari que la formule eut une fin prématurée lorsque le Championnat du Monde fut couru avec les mêmes réglementations que la Formule II ; elle fut introduite en 1948 pour les moteurs 2L sans compresseur (ou 500 cc surcompressés).

En fait, personne n'utilisa de compresseurs. Le résultat fut une nouvelle domination de Ferrari. Lampredi produisit un moteur 2 L de quatre cylindres d'une puissance de 160 cv qui donna à Alberto Ascari le Championnat du Monde des Conducteurs en 1952 et 1953.

Il était cependant significatif qu'une opposition farouche vienne d'une petite société spécialisée anglaise. Les Cooper, père et fils, Charles et John, avaient pénétré dans le monde de la course en fabriquant des voitures miniatures de 500 cc (aux moteurs JAP de motocyclettes) ; ce fut une école de promotion pour la plupart des futurs champions britanniques d'après-guerre.

En 1952, les Cooper placèrent un moteur 2L dans une carrosserie légère et le blond Mike Hawthorn, portant un noeud papillon, livra dans l'une d'elles une telle bataille aux Ferrari que Ferrari l'engagea pour la saison suivante.


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La suprématie britannique

En 1954, une nouvelle Formule I de 2,5 L, sans compresseur ou 750 cc avec, fut produite mais l'emploi du compresseur était terminé. Il dura sept ans et apporta à la course automobile une adhésion de masse.

Mercedes Benz revint au sport avec une nouvelle voiture utilisant l'injection au lieu de carburateurs, une organisation magnifique et un travail d'équipe. Mercedes avait aussi l'Argentin Juan Manuel Fangio comme premier pilote, et il remporta le Championnat du Monde en 1954 et 1955. Mais, en 1955, Tony Brocks, inconnu de Formule I, amena une Connaught, produit d'une autre petite société anglaise spécialisée, à Syracuse et devint le premier Anglais dans une voiture anglaise à remporter un Grand Prix depuis trente ans. Ce n'était pas un Grand Prix important et la société Connaught devait bientôt disparaître mais c'était comme une déclaration d'intention de la Grande-Bretagne.


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Les voitures anglaises avaient déjà réussi dans les courses de voitures de sport. Aux 24 heures du Mans, des Jaguar type C et D de 3,4 L à 3,8 L gagnèrent en 1951 et en 1953 (grâce à l'utilisation d'avant-garde des freins à disques) et en 1955 (l'année du plus affreux désastre automobile : une Mercédés heurta une Healey et plus de quatre-vingts spectateurs périrent) ainsi qu'en 1956 et 1957.

Dans les courses de Formule I, ce fut Fangio « le vieux aux jambes arquées » qui domina plutôt que les constructeurs. Il remporta à nouveau le Championnat du Monde en 1956 avec une Lancia Ferrari (Ferrari ayant repris les voitures de course Lancia) et en 1957 avec la Maserati 250 F. En 1958, l'année où l'utilisation de l'alcool comme carburant fut interdite, Fangio se retira. Mike Hawthorn gagna, en Ferrari, le Championnat du Monde des Conducteurs, mais la coupe du monde des constructeurs fut remportée par la Vanwall anglaise créée grâce au fabricant de roulements à billes millionnaire Tony Vandervell. Il avait été l'un des premiers vrais sponsors de la B.R.M., mais après certains désaccords avec d'autres membres de ce projet malheureux, il les quitta pour former sa propre équipe.

Ses pilotes étaient Stirling Moss qui manqua le Championnat du Monde d'un seul point, Tony Brooks, le héros de Syracuse et Stuart Lewis-Evans tué tragiquement à la fin de la saison. Tout à coup, les voitures vertes britanniques occupaient les premiers rangs des grilles de départ et la langue utilisée autour des fosses semblait être devenue l'anglais plutôt que l'italien ou l'espagnol. L'écurie Vanwall se disloqua en 1959 à cause de la maladie de Tony Vandervell, mais l'Angleterre était désormais au sommet.

Le Championnat du Monde fut gagné par l'Australien Jack Brabham sur une Cooper. Cette voiture utilisait un moteur Coventry Climax, quatre cylindres de 240 cv, originellement conçu pour des pompes d'incendie et il était situé là où Cooper avait placé le moteur dans ses ii midgtes » 500 cc : derrière le pilote. Et une nouvelle révolution balaya désormais la course automobile lorsque toutes les marques passèrent au moteur à l'arrière.

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1961 commença par une querelle : une nouvelle formule exigeait des moteurs 1,5 L sans compresseur.

Elle demandait aussi l'emploi d'une pompe à essence et la pose de démarreurs autonomes, mais ce fut la limite de cylindrée qui posa des problèmes. Les constructeurs anglais refusèrent la nouvelle formule. Ils proclamèrent qu'il n'y aurait ni spectacle. ni intérêt avec des voitures d' 1,5 L et que les voitures de Grand Prix devaient être plus puissantes.

Les Anglais refusaient de croire qu'une nouvelle formule pouvait être imposée contre leur volonté alors qu'ils étaient les principaux fabricants de voitures de Formule I et c'est pourquoi ils ne firent aucun projet dans cet ordre. Lorsqu'elle commença, malgré leurs objections, ils tentèrent de continuer à faire courir des voitures de 2,5 L dans une formule rivale, mais à la fin, ils acceptèrent leur défaite et entreprirent de rattraper ce temps perdu. Ils ne disposaient que d'un seul moteur : un bloc Coventry Climax de quatre cylindres, 1475 cc, qui était apparu tout d'abord en Formule II en 1957 : ainsi Ferrari. qui avait commencé depuis longtemps à préparer un moteur V 6 de 180 cv à 9 000 tr,/mn, n'eut aucune difficulté à triompher, bien qu'il fût remarquable que le champion du monde ait été, pour la première et dernière fois, un Américain, Phil Hill.

Mais l'année suivante, Ferrari eut des ennuis lorsque la plupart de ses meilleurs techniciens partirent après un désaccord. Les fabricants anglais les avaient alors rattrapés. B-R-M qui faisait partie, à cette époque, de l'organisation Owen, avait produit son propre moteur V 8 de 1498 cc et le Championnat du Monde alla au Londonien Graham Hill, bien qu'il ait lutté toute la saison contre l'Écossais Jim Clark au volant de la Lotus au moteur Coventry Climax créée par Colin Chapman. En 1963, Clark remporta le titre au volant d'une Lotus 25 équipée de la version Mark II du moteur V 8 Coventry Climax convertie à injection, et d'une puissance de 200 cv à 10 000 trl'mn. Cette nouvelle formule rendait l'allégement essentiel, et, dans ce but et pour maintenir en même temps la résistance, Chapman en était arrivé à la construction monocoque consistant en une coque sans châssis au lieu du châssis multitubulaire. Pour s'adapter à cette nouvelle carrosserie basse et fine, Clark fut obligé d'avoir une position presque couchée.


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D'autres fabricants suivirent le modèle et les enthousiastes se plaignirent de l'aspect identique des voitures de Formule I.

La majorité utilisait même un moteur Coventry Climax et elles se ressemblaient toutes. Qui plus est, les pilotes étant presque couchés dans leurs voitures, on ne les voyait pour ainsi dire plus. Seules leurs têtes casquées émergeaient de l'habitacle. On ne pouvait plus, comme quelques années auparavant, voir leurs bras et leurs coudes bouger, comme c'était le cas lorsque le pilote était grand, Mike Hawthorn par exemple.

Les nouvelles voitures convenaient mieux aux pilotes bâtis comme des jockeys. Mais les améliorations apportées aux moteurs, à la suspension et aux pneus de plus en plus gros et larges signifiaient que les voitures 1,5 L allaient bientôt surpasser les voitures 2,5 L, conçues cinq ans auparavant.

En 1964, la compétition était très ouverte et se termina par la défaite de justesse de Clark battu par John Surtees en Ferrari V 8. Cette année vit aussi le début du Japon dans les courses de Grand Prix. Après avoir dominé la moto avec leurs moteurs multicylindres tournant très vite, les Japonais s'étaient tournés vers les quatre roues et produisirent la Honda V 12 conduite par l'Américain Ron Bucknum, mais la douze cylindres eut des ennuis de mise au point et, en vérité, le Japon a encore à se faire une réputation dans l'avenir.

Il y eut aussi un tournant dans la course de voitures de sport en 1964. Les 24 Heures du Mans avaient été un monopole de Ferrari, pour ainsi dire depuis 1960. En 1964, Ford prit place pour une confrontation. Cela faisait partie d'un vaste programme pour changer l'image de marque mondiale de Ford : celle de fabricants de « lézards en fer blanc » pour celle de constructeurs de mécaniques de précision, et dans ce but ils produisirent la GT 40, voiture de sport ainsi nommée car elle avait seulement 40 inches de haut.

Conçue par Eric Broadley, qui avait créé la voiture de sport Lola, elle avait au départ un moteur Indianapolis 4,2 L donnant 350 cv à 7 200 tr/mn. Ford connut également des ennuis de mise au point, mais devait battre Ferrari en 1966 et dominer Le Mans pendant les trois années suivantes ; à ce moment-là, les Américains avaient réussi ce qu'ils avaient projeté de faire et les voitures présentées au Mans étaient passées de celle du type de la production à un modèle caréné, au moteur moyen bourré de puissance, ressemblant à quelque chose sorti d'une bande de science fiction.

Dans la dernière année de la Formule I à 1,5 L en 1965, Clark et Lotus gagnèrent à nouveau et Clark trouva même le temps de s'élancer jusqu'à Indianapolis avec une Lotus spéciale afin de remporter la première victoire britannique là-bas. La nouvelle Formule I, présentée en 1966, prévoyait des moteurs de 3L et la plupart des constructeurs eurent l'intention d'utiliser des moteurs V 12.


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Naturellement, on s'attendait à des problèmes au début et le rusé Jack Brabham en tira de nombreux avantages. Champion du monde en 1959 et en 1960, il avait commencé à fabriquer ses propres voitures de Grand Prix quatre ans plus tôt. Il choisit la simplicité et la sécurité et utilisa un moteur Repco V 8 fabriqué en Australie, conçu par Phil Irving. Ce moteur donnait seulement 285 cv à 8 200 tr/mn, mais il était sûr et Brabham donna à sa voiture un poids léger et une bonne maniabilité.

Brabham continuait lorsque les voitures aux moteurs plus sophistiqués abandonnaient, et le Championnat du Monde fut à lui ; c'était la première fois qu'un pilote gagnait dans une voiture qu'il avait fabriquée lui-même. L'année suivante Brabham surprit à nouveau tout le monde. Cette fois, le coéquipier de Brabham, Denny Hulme, de Nouvelle- Zélande, remporta le titre avec Brabham second. Mais cela ne pouvait continuer et ne continua pas. En 1967, la firme Cosworth, soutenue par Ford, produisit un nouveau moteur V 8 tout en aluminium, de 2 993 cc, qui donnait 400 cv à 9 000 tr/mn. Il fut rendu disponible à toutes les marques, tout comme auparavant le Coventry Climax que la plupart adoptèrent. Mais, en 1968, ce fut Graham Hill qui gagna dans une Lotus Ford 49 B, après que son coéquipier, Jim Clark, eut été tué dans une course de Formule II à Hockenheim en Allemagne.

La Lotus victorieuse de Hill fut peinte en rouge, blanc et or et portait les mots « Équipe Lotus Players Gold Leaf» pour servir de publicité à la société de tabac qui avait patronné l'équipe Lotus. Les couleurs nationales traditionnelles ne signifiaient plus rien depuis que, quelques années auparavant, les marques britanniques avaient commencé à dominer la course automobile ; les compagnies de carburant et de pneus avaient soutenu les équipes depuis des années, mais la transformation d'une voiture en panneau mobile pour une marque de cigarettes choqua de nombreux enthousiastes en Angleterre.

Néanmoins, la publicité sur les voitures devait vite s'étendre. De même, on utilisa des ailerons-ailes sur l'arrière de la voiture pour aider à sa stabilité au sol. Ils avaient été innovés dans les courses de voitures de sport par les voitures Chaparral de l'Américain Jim Hall en 1966, et Brabham et Ferrari les présentèrent en course de Formule I en 1968. En ,1969, toutes les voitures les adoptaient, mais au Grand Prix d'Espagne deux Lotus les perdirent et pour le Grand Prix de Monaco, ils furent interdits.

Puis les autorités cédèrent et,les ailerons furent autorisés mais avec des limitations de taille, et existent toujours sur les voitures de course. Le moteur Ford Cosworth continua à équiper la plupart des voitures concurrentes en Formule I. En 1969, l'Écossais Jackie Stewart, conduisant une Matra française, avec le moteur anglais Cosworth, gagna le Championnat du Monde. Matra, McLaren et Lotus avaient tous fait des essais avec les quatre roues motrices, ce qui n'était pas une idée nouvelle, Stirling Moss avait gagné une course en 1961 dans une voiture expérimentale Ferguson à quatre roues motrices, mais le système ne convenait pas à toutes les situations.

1970 vit les débuts de la voiture March qui fut créée, construite à Bicester (Oxford), et utilisée sur circuit en quelques mois. March ne dirigeât pas seulement une équipe de travail, il offrit aussi sur le marché une voiture, au moteur Cosworth bien connu, et il y eut bientôt plus de voitures March sur les lignes de départ que de n'importe quelle autre marque.

Le marchand de bois Ken Tyrell, patron de Jackie Stewart, lui en acheta une, mais la voiture ne remplit pas ses proinesses, et le Championnat du Monde fut, pour la première fois, attribué à titre posthume. Il alla au pilote autrichien Jochen Rindt, gagnant quatre courses consécutives dans une Lotus 72 avant de trouver la mort à l'entraînement du Grand Prix d'ITALIE de Monza.

Ses points d'avance lui permettaient de ne pas être dépassé. Cependant, Tyrell n'avait pas eu l'intention de se fier seulement à la March et avait commandé à Derek Gardner une voiture qui devait s'appeler la Tyrell. Elle avait également un moteur Cosworth d'une puissance de 450 cv en 1971 et cette année-là, Stewart remporta six Grands Prix et le Championnat du Monde. Tyrell est l'un des rares participants privés dans la course de Formule I, mais les grands constructeurs se sont également retirés. Aujourd'hui, les voitures sont le produit de petites sociétés spécialisées et sont financées par des compagnies qui n'ont pas nécessairement de liens avec l'automobile.

En 1972, l'équipe Surtees était financée par une société de thé, McLaren par une société de parfums, B.R.M. par des cigarettes et Tecno par un apéritif. Lotus ne se servait plus de son nom pour ses voitures. Elles étaient tout simplement des John Player Specials. Mais les prix ont augmenté de façon astronomique. Levassor et ses contemporains pouvaient utiliser des voitures ordinaires et courir avec elles. Mais, toute la course automobile a changé depuis le temps de l'inoubliable parcours de Levassor dans la première course de 1895. Elle a beaucoup changé aussi pendant le dernier quart de ce siècle. On obtient plus de puissance de petits moteurs, et la tenue de route a été améliorée.

Les pilotes ont également changé. Ils étaient auparavant des hommes aisés qui avaient un violon d'Ingres. Aujourd'hui, les pilotes de Formule I sont de vrais professionnels, avec une très grande connaissance technique.

Toutefois, une chose n'a pas changé : la course automobile est toujours un sport dangereux.

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