La Carrosserie Touring

Histoire : La carrosserie Superleggera

Gilles Bonnafous le 03/01/2005

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Dix ans après sa création, Touring invente une technique qui reprend la séparation châssis–carrosserie du système Weymann mais va plus loin : la carrosserie Superleggera est entièrement métallique. Elle supprime ainsi les inconvénients du procédé Weymann : mauvaise résistance aux intempéries et fragilité en cas d’accident. Surtout, celui-ci emprisonnait le styliste dans une esthétique sévère et il se prêtait mal aux formes plastiques et aux lignes convexes, dont se nourrit le style aérodynamique. De plus, les surfaces mates qu’il engendrait empêchaient les jeux de reflets et estompaient les volumes.

Les Superleggera sur le stand Alfa Romeo du salon de Milan 1937 : la 8C 2900 B lungo (berlinette et
Les Superleggera sur le stand Alfa Romeo du salon de Milan 1937 : la 8C 2900 B lungo (berlinette et D.R
La légèreté du treillis tubulaire Superleggera
La légèreté du treillis tubulaire Superleggera D.R

Mise en œuvre à partir du deuxième semestre 1937, la carrosserie Superleggera remplace le bois de la charpente par des tubes de petit diamètre et des profilés d’acier soudés entre eux au chalumeau, avant d’être joints au châssis par des points de soudure autogène. Outre sa légèreté, l’avantage de ce treillis tubulaire est une grande rigidité. Quant au similicuir, il se voit préférer des panneaux d’aluminium martelés et réalisés à la main. L’aluminium étant difficile à souder, les feuilles métalliques atteignent la plus grande taille possible afin de limiter le nombre de points de soudure. Ceci suppose une main-d’œuvre particulièrement habile. Comme pour la construction Weymann, ce revêtement d’aluminium est indépendant de la structure portante à laquelle il est simplement agrafé en quelques points.

Alfa Romeo 2500 SS coupé 2 places
Alfa Romeo 2500 SS coupé 2 places D.R
Alfa Romeo 2500 SS cabriolet 4 places 1940
Alfa Romeo 2500 SS cabriolet 4 places 1940 D.R

Il convient de replacer l’introduction du système Superleggera dans son contexte historique, celui d’une époque passionnée par l’aérodynamique. Cette avancée technique va permettre à Touring d’enrichir de son talent et de sa créativité le style aérodynamique alors plein essor. Malgré les difficultés posées par l’assemblage, la firme saura conjuguer cette technologie avec une exceptionnelle harmonie esthétique. Le système Superleggera bénéficie également des progrès de la métallurgie des alliages légers, l’aluminium et sa malléabilité favorisant l’éclosion des formes galbées propres au style profilé. De même, le recours au plexiglas pour la lunette arrière et les fenêtres de custode participe à la légèreté de la voiture. Il favorise aussi la liberté du dessinateur en lui permettant de galber les vitres.

Maquette au 1/5 de la Fiat 2800 berlin
Maquette au 1/5 de la Fiat 2800 berlin D.R
Lancia Aprilia modèle unique
Lancia Aprilia modèle unique D.R

La légèreté remarquable de la carrosserie Superleggera tient également à l’utilisation de matériaux adaptés à leur usage, portières en duralumin, ailes et toit en aluminium, entourage des fenêtres en alliage non sujet à la corrosion, etc. Le poids ainsi économisé permet aux voitures habillées par Touring d’offrir un niveau de confort et de finition inédit sur des automobiles de sport. La majorité des accessoires est couverte par des brevets maison, à l’image des vérins de portières, des dispositifs de fermeture des capotes, des poignées de portes escamotables et des sièges à dossier réglable.

Alfa Romeo 6C 2500 berlinette 1940
Alfa Romeo 6C 2500 berlinette 1940 D.R
Fiat 1500 1938
Fiat 1500 1938 D.R

Présentée au salon de Milan 1937 sur le stand Alfa Romeo, la première Touring Superleggera fait sensation sous les traits de la 8C 2900 B lungo aux formes somptueuses (exposée en versions berlinette et spider). Réalisée pour les Mille Milles 1937, la berlinette Alfa Romeo 6C 2300 MM est également l’une des toutes premières Superleggera. Pilotée par l’équipage Boratto-Guidotti, elle remportera sa catégorie et, plus important, terminera quatrième au classement général. La version commercialisée voit sa ligne retouchée. Moins radicale, elle reçoit un toit rehaussé pour accueillir deux passagers à l’arrière, ainsi qu’une poupe redessinée. Plus fluide et plus élégante, celle-ci hérite de la fameuse « queue de baleine ». La voiture côtoie la 8C 2900 B au salon de Milan.

Fiat 1500 Touring Superleggera
Fiat 1500 Touring Superleggera Motorlegend.com
Alfa Romeo 6C 2300 B Mille Miglia
Alfa Romeo 6C 2300 B Mille Miglia Motorlegend.com

Toutes les berlinettes Superleggera offrent quatre places : la Lancia Aprilia, qui connaîtra quelques variantes (des détails), tout comme la Fiat 1500 présentée au salon de Paris 1937. Celle-ci arbore une originale calandre aveugle (prua cieca) brevetée, qui lui confère un charme particulier. Sur les séries qui vont suivre à partir de 1938, des fentes verticales apparaîtront sur le nez pour une meilleure ventilation du moteur. On retrouvera la « prua cieca » sur la grosse Fiat 2800 et sur quelques Alfa Romeo, dont la 6C 2300 MM réalisée pour Prospero Gianferrari, le directeur général d’Alfa Romeo. En 1939, la nouvelle 6C 2500 Sport annonce, à bien des égards, le style Touring de l’après-guerre. Quant à la 6C 2500 SS, elle est l’une des plus belles voitures sorties des ateliers Touring, aussi bien en coupé deux places qu’en cabriolet baptisé « Duxia ».

Construite jusqu’au terme de l’existence de la firme, la carrosserie Superleggera participera grandement à la renommée de Touring. Mais avec les années soixante, cette technique sophistiquée, coûteuse à fabriquer et peu compatible avec l’industrialisation de la production ne sera plus en phase avec son époque.

Alfa Romeo 6C 2300 MM version course
Alfa Romeo 6C 2300 MM version course D.R
Alfa Romeo 8C 2900 B
Alfa Romeo 8C 2900 B D.R
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