Saga Bugatti

Mécanicien de génie et constructeur avant-gardiste, Ettore Bugatti donnera naissance à de nombreux chefs-d’œuvre.

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Histoire : Ettore et Jean Bugatti

Gilles Bonnafous le 13/09/2006

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Bedaine de sénateur et profil de Pinocchio, le patron a une sacrée bouille. Et du caractère. Mécanicien de génie et constructeur avant-gardiste, Ettore Bugatti est animé par une incessante quête du beau, qui donnera naissance à de nombreux chefs-d’œuvre. Technique avancée, démarche esthétique et qualité de finition expriment sa devise : « Rien n’est trop beau, rien n’est trop cher ».

Ingénieur d’instinct plus que de formation — qu’il n’a pas eue —, Ettore Bugatti dessine des plans, qui constitueront pour ses ingénieurs la base des voitures élaborées à Molsheim. Pour lui, « le dessin règne en maître absolu sur la construction automobile ».

L’homme a une forte personnalité. Mauvais caractère ? Entier en tout cas. Force est de constater que ses trois collaborations, avant qu’il ne s’établisse à son propre compte, n’ont pas duré longtemps. Manifestement, Bugatti n’est pas fait pour travailler chez les autres. Un tempérament obstiné aussi, qui lui fera prendre parfois des attitudes rétrogrades. A l’image de la Type 57, qui attendra 1938 pour recevoir des freins hydrauliques sur l’insistance de son fils Jean.

Ettore Bugatti
Ettore Bugatti D.R.
La Bugatti Type 2
La Bugatti Type 2 D.R.

Le « Patron », comme tout le monde l’appellera dans l’entreprise, passera pour un chef fier, au caractère autoritaire, difficile et sensible. Mais son inventivité n’aurait pu rencontrer tant de succès s’il n’avait su s’entourer d’ingénieurs de talent pour la réalisation de ses projets.

Ettore Bugatti naît à Milan en 1881 dans une famille d’artistes. Son père, Carlo Bugatti, est un sculpteur et ébéniste renommé. Après un rapide passage par les Beaux-Arts, le jeune Ettore entame contre les vœux paternels un apprentissage chez un constructeur de cycles et tricycles, Prinetti & Stucchi. Mais c’est l’automobile naissante qui l’attire. A 17 ans, il motorise un tricycle avec un moteur De Dion et participe déjà à quelques courses. En 1899, il monte son premier véhicule à quatre roues. La Type 1, comme on l’appellera plus tard, comporte quatre moteurs implantés de part et d’autre de l’essieu arrière.

En 1900, il réalise avec l’aide financière d’un ami de son père, le comte Gulinelli, celle que l’on peut considérer comme la première vraie Bugatti, la Type 2. Elle est motorisée par un quatre cylindres à soupapes en tête, l’un des premiers au monde, et sa boîte possède quatre vitesses. Présentée en mai 1901 à l’Exposition automobile internationale de Milan, la voiture y est très remarquée et obtient une médaille.

Parmi les enthousiastes du salon de Milan, figure le baron de Dietrich, constructeur de véhicules utilitaires à Niederbronn, en Alsace alors allemande. Il engage le jeune Ettore et achète sa licence de fabrication pour créer une gamme d’automobiles — Bugatti est encore mineur et c’est son père qui signe.

A Niederbronn, il crée les Types 3 (5,3 litres), 4 (7,4 litres) et 5 12,9 litres), des quatre cylindres à soupapes en tête, qui sont vendues sous le nom De Dietrich-Bugatti. En 1902, il prend part à une course à Francfort au volant de la grosse 12,9 litres. Mais en 1904, de Dietrich met fin au contrat. On ne sait trop la raison, mais on pense que le baron estime qu’Ettore se consacre trop aux voitures de course et néglige la production.

La Bugatti Type 9
La Bugatti Type 9 D.R.
Une De Dietrich
Une De Dietrich D.R.

Emile Mathis, agent De Dietrich à Strasbourg, propose alors à Bugatti de concevoir des voitures qu’il commercialiserait. Fabriquées par la SACM à Illkirch-Graffenstaden et baptisées Hermès, elles ressemblent à des De Dietrich-Bugatti. Ce sont la Type 6 (50 ch et 60 ch) et la Type 7 (90 ch). Mais les clients se révèlent très mécontents et Bugatti se brouille avec Mathis.

En 1907, Bugatti s’installe à Cologne où il travaille pour la fabrique de moteurs à gaz Deutz. Il y crée des modèles à quatre cylindres de forte cylindrée, les Types 8 et 9. Les voitures ne connaissent pas le succès commercial et, deux ans plus tard, Deutz rend sa liberté à Bugatti. Mais Ettore a construit pour son propre compte et dans le sous-sol de son domicile, à Mülheim, un petit châssis équipé d’un quatre cylindres à soupapes en tête et d’une transmission par arbre. La Type 10 est née, elle sera le premier pur-sang Bugatti. Proche de la Deutz, mais en réduction, c’est une voiturette de 1,2 litre. Bugatti l’a compris, le poids c’est l’ennemi.

Avec le soutien d’un banquier espagnol installé en Alsace, Augustin de Vizcaya, Ettore s’établit à son compte en 1909 dans une ancienne teinturerie située à Molsheim. Le 1er janvier 1910, s’ouvre le chapitre décisif de la vie de Bugatti. « Les Automobiles Ettore Bugatti » vont commencer à construire la Type 13, une Type 10 améliorée.

Avec la Première Guerre mondiale, Ettore, citoyen italien, part avec sa famille à Milan. Son pays ayant rejoint le camp des Alliés, il s’installe à Paris dans l’appartement de la rue Boissière qu’il gardera jusqu’à sa mort. Il y développe des concepts de moteurs d’avion qui n’auront pas grand succès. Il réintégrera son usine de Molsheim à la fin de 1919.

Jean Bugatti
Jean Bugatti D.R.
La Bugatti Type 10
La Bugatti Type 10 D.R.

Troisième enfant d’Ettore, Jean Bugatti est né en 1909 à Cologne. Lui aussi est doué d’un grand talent. Pour ce jeune homme à la fois sensible et déterminé, ce ne sera pas tâche aisée que de s’affirmer face à un tel père. Il commencera à dessiner des carrosseries à l’âge de 21 ans, ses premières esquisses datant de 1930. Il sera l’auteur des magnifiques Types 50, 55 et 57, ainsi que du roadster Royale destiné à l’industriel Esders (non réalisé à l’époque).

En 1936, l’usine de Molsheim est paralysée par une grève, qu’Ettore ne comprend pas et qui va le blesser profondément. Il fuit Molsheim et s’installe à Paris. En l’absence de son père, Jean, appelé à la direction de l’usine, dirige la production à Molsheim. Pilote d’essai à l’occasion, il se tuera trois ans plus tard en essayant une voiture de course, la Type 57 C Le Mans. Quant à Ettore, il décédera le 21 août 1947 d’une pneumonie. Il avait 66 ans.

La Bugatti Type 55
La Bugatti Type 55 D.R.
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