Saga Buick

Marque huppée, Buick a toujours proposé pour l’essentiel des voitures opulentes destinées à une clientèle bourgeoise. Elle ne s’en est pas moins placée, avec Cadillac, à la pointe du design de Detroit.

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BUICK Roadmaster

Gilles Bonnafous le 21/11/2003

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Président de Buick, Harlow Curtice remplace en 1936 les banales appellations chiffrées des modèles par des noms évocateurs des qualités des voitures — interprétées dans le langage marketing cher aux Américains. La série 40 est rebaptisée Special (la série 50 disparaissant), la série 60 devient Century et la série 90 Limited. Créée en 1931 et retirée en 1934, la série 80 réapparaît sous le vocable Roadmaster et prend place entre la Century et l’exclusive et fort coûteuse Limited.

Buick Roadmaster 1939
Buick Roadmaster 1939 Buick
Buick Roadmaster Sedanet 1946
Buick Roadmaster Sedanet 1946 D.R

Cette refonte de la gamme s’accompagne d’une réorganisation des motorisations, dont le nombre se limite désormais à deux. Ce sont des huit cylindres en ligne à soupapes en tête, un 233 c.i. et le nouveau 320 c.i., soit 5245 cm3, commun aux Century, Roadmaster et Limited. Née en 1936 avec 120 ch développés à 3200 tr/mn, cette mécanique évoluera rapidement : 130 ch dès l’année suivante, 141 ch en 1938 et 165 ch à 3800 tr/mn en 1941.

La Seconde Guerre mondiale sera fatale à la Limited, qui disparaît avec la reprise de la production en 1946. La Roadmaster est alors promue au rang de modèle Buick de haut de gamme. Présentée dans les publicités comme "Master of the American Road", cette maîtresse de la route prend les traits d’une bourgeoise opulente. Porté par le design majestueux de la marque, ce caractère ira croissant au cours des années cinquante. Généreuse dans ses galbes et ses rondeurs charnues, la Roadmaster devient alors un vaisseau baroque dans ses formes comme dans sa décoration frivole. Une œuvre d’art qui croule sous le poids des chromes et dont la masse atteint deux tonnes pour une longueur de près de 5,50 mètres…

BUICK
D.R
BUICK
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La gamme Roadmaster se compose de quatre modèles : berline, coupé hardtop (c’est-à-dire sans montants), cabriolet et break «Estate Wagon». A l'image d'un général fier de ses étoiles, la Roadmaster arbore ses quatre «ventiports», des sorties d’air postiches disposées sur les ailes avant depuis 1949. On ne saurait ainsi la confondre avec la piétaille des modèles inférieurs, les Special et Super qui n'en affichent que trois ! Introduite en 1948, la transmission automatique Dynaflow est d’abord montée en option sur la Roadmaster, puis en série dès l’année suivante.

Buick Roadmaster 1952
Buick Roadmaster 1952 Motorlegend.com
Buick Roadmaster 1952
Buick Roadmaster 1952 Motorlegend.com

Le capot moteur Buick a la particularité de s’ouvrir latéralement, la manœuvre étant possible de chaque côté. Il découvre à demi l'impressionnant huit cylindres en ligne abrité derrière la muraille du radiateur. Peint en bleu pétrole, le 320 c.i. porte l'inscription «Buick Fireball Valve in-Head» (soupapes en tête). Cette merveille de souplesse reçoit des poussoirs hydrauliques en 1950. En vitesse de croisière, le silence est à la hauteur du jugement exprimé en 1952 par un journaliste américain de "Mechanix Illustrated", qui l'avait trouvée «aussi silencieuse qu'un samedi soir dans une église»…

Sur la route, la souplesse de la suspension engendre des mouvements ondulatoires — les fameux effets de bateau —, dont la majesté soulève plus l'admiration du spectateur que celle du conducteur. Conçue pour rouler tout droit sur les «highways» d’outre-Atlantique, la Roadmaster s’avère totalement inadaptée aux petites routes européennes. En virage, son inertie considérable se manifeste par un fort roulis, que la revue américaine «Motor Trend» traduisait ainsi : «Elle prend de la gîte et s'écrase en virage comme un marshmallow !». Et l'on ne saurait compter sur la direction assistée (une option disponible à partir de 1952) et très démultipliée pour maîtriser la situation.

Buick Roadmaster 1954
Buick Roadmaster 1954 D.R
Buick Roadmaster 1955
Buick Roadmaster 1955 D.R

Le huit cylindres en ligne connaît son chant du cygne avec le millésime 1952 (il développe alors 170 ch). Equipant les Cadillac et les Oldsmobile depuis 1949, les nouveaux V8 à course courte ont démontré leur supériorité technique. De plus, les nouvelles recherches de style requièrent un profil de moteur plus bas.

Pour fêter les cinquante ans de la marque en 1953, la Roadmaster — tout comme la Super — reçoit en cadeau d'anniversaire un V8 de cylindrée équivalente (322 c.i., soit 5278 cm3) développant 188 ch (contre 164 ch pour la Super). Dès lors, la puissance va évoluer par étapes annuelles à l’image du design renouvelé à chaque millésime : 200 ch en 1954, 236 ch en 1955, 255 ch en 1956 et 300 ch en 1957.

Buick Roadmaster 1954
Buick Roadmaster 1954 D.R
Buick Roadmaster 1956
Buick Roadmaster 1956 D.R

C’est dans la profusion des chromes qui la surchargent que la Roadmaster se retire à la fin de 1958. Par contre, les sorties d’air postiches, qui signalaient jusqu’à présent le grade de la voiture, disparaissent des ailes avant. Toujours en 1958, la Limited renaît de ses cendres pour disparaître à nouveau l’année suivante.

Tout au long des années cinquante, la Roadmaster a remarquablement illustré le monde merveilleux de l'art décoratif imaginé par les stylistes de la General Motors. Çà et là, un motif baroque, un profil recherché ou une courbure discrète soulignent la richesse et la fantaisie du design américain. Un sommet de l’art kitsch avant la naissance d’un style plus dépouillé. Car, comme en 1936, la gamme Buick sera remodelée en 1959 et renouvelée quant à l’appellation de ses modèles.

Buick Roadmaster berline 1958
Buick Roadmaster berline 1958 D.R
Buick Limited 1958
Buick Limited 1958 D.R
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