Salon de Detroit 2006

Compte rendu

Jean Michel Cravy le 06/01/2006

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Janvier, c'est le temps du plus grand salon de l'auto d'Amérique du Nord. Mais le salon de Detroit 2006 a la gueule de bois...

Janvier, c’est le temps du plus grand salon de l’auto d’Amérique du Nord. Mais Detroit a la gueule de bois. Non pas à cause des lendemains de fêtes. Mais parce que la capitale de l’automobile américaine (fondée en 1701 par le Français Antoine de la Mothe-Cadillac sous le nom de Pontchartrain du Détroit, mais surtout connue pour être le siège historique des « big three », Ford, General Motors et Chrysler) n’en finit plus de s’enfoncer dans la crise. Il y avait déjà eu celle des années 80 qui avait laissé la grande agglomération du Michigan exsangue, faute d’avoir su renoncer à temps à ses dinosaures à gros moteurs V8 et faire face à la montée en puissance des constructeurs japonais.

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Courageusement, Detroit s’était remis en marche. Si plus de 12 000 demeures dans les banlieues huppées avaient été laissées à l’abandon, squattées par une population pauvre et déclassée, le centre ville s’était offert une nouvelle naissance… d’où le nom du grand complexe hôtelier, aujourd’hui propriété de General Motors, le « Renaissance Center ». Las ! Detroit, dont la population dépassait les 1,8 millions dans les années 50, est passée sous les 900 000 personnes. La ville est sinistrée. Un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté. L’éducation publique va à vau-l’eau, la chaussée des rues, souvent désertes, même au centre, est sommairement raccommodée, la criminalité atteint des taux records. En quasi-faillite, Detroit pourrait être mise sous tutelle administrative…

Et ce n’est malheureusement pas fini. General Motors a annoncé à la fin de l’année dernière un plan de restructuration drastique : 30 000 suppressions d'emplois en Amérique du Nord d'ici à 2008 sur un effectif total de 173 000 et la fermeture totale ou partielle de 12 sites, sur un total de 77. L'objectif est de revenir à une taille capable de supporter une baisse de la production de 30% par rapport aux chiffres de 2002. Ford n’est pas en reste, prévoyant la suppression de 25 à 30 000 emplois d’ici à 5 ans et la fermeture de 10 usines en Amérique du Nord. Celles-ci ne tournent actuellement qu’à 72% de leur capacité. Et n’oublions pas Delphi, l’équipementier jadis propriété de GM, situé à Flint, à une cinquantaine de kilomètres au nord-ouest de Detroit, qui vient de se mettre sous la protection de la loi des faillites. Seul Chrysler, propriété du groupe Daimler, tire à peu près son épingle du jeu grâce au surprenant succès de la 300C. Un succès fragile puisqu’il repose sur un seul modèle…

Ford a avoué 1,2 milliard de dollars de pertes au cours du dernier semestre 2005, General Motors 1,3 milliard… pour le seul dernier trimestre 2005 ! Comment en est-on arrivé là ? Depuis bien longtemps, les « big three » subissent la domination des Japonais et des Coréens dans la catégorie des berlines moyennes, sobres et fiables. Dans la catégorie supérieure, les Américains, traditionnellement, défendent leurs positions pied à pied, à grands renforts de rabais spectaculaires, pour apparaître dans les premières places des best sellers. A que prix ! Alors que le profit par véhicule japonais vendu oscille entre 1200 et 1800 dollars, il n’est que de 186 dollars pour DaimlerChrysler. Et les pertes s’élèvent à 139 dollars par véhicule pour Ford, et… 1227 dollars pour General Motors !

Pire encore : malgré ces efforts désespérés, les ventes de GM et Ford s’effondrent (- 24 et - 20%) alors que celle des japonais progressent (+ 16 % pour Nissan)… C’est que l’Amérique est frappée par une vague de « SUVphobie » soudaine. Les « light trucks » (catégorie regroupant les 4x4 et les pick-ups) étaient le dernier rempart des constructeurs américains, qui n’ont pas anticipé le renchérissement du pétrole et la désaffection croissante du public pour les SUV « full size », qui se tourne de plus en plus vers les voitures hybrides type Toyota Prius.

C’est dans ce sombre contexte que s’ouvre donc cette nouvelle édition du Salon de Detroit. Les Américains, pour autant, n’entendent pas céder au désespoir. Par exemple, Ford a investi massivement afin de mettre ses produits en valeur (ainsi que toutes les marques du groupe) dans un kiosque de plus de 10 000 m2 qui aura nécessité l’utilisation de 180 tonnes de métal et 2400 écrans de télévision.

Les premières vedettes américaines sont, chez Ford, le concept Edge et le Lincoln New Aviator, deux 4x4…malgré tout, et la Mustang convertible dans une version Shelby GT500, chez GM, nous découvrirons la Chevrolet Camaro, déclinaison de la Corvette, en plus abordable, le nouveau 4x4 Tahoe et son demi frère le GMC Yukon, tandis que Chrysler dévoilera deux concept cars : l’Imperial et la Dodge Challenger.

Les étrangers ne seront pas en reste. Aston Martin présente la Rapide, version limousine de la DB9, Audi une S6 mue par un V10 de 440 ch, BMW la version M de son roadster Z4, Hyundai le concept Talus et son nouveau Santa Fe, Jaguar la version décapotable de sa XK, Kia son concept Soul, Lexus sa LS, cousine de luxe de la nouvelle Toyota Camry, également déclinée en version hybride, Mazda le concept car Kabuka, Mercedes sa nouvelle génération de Classe G, le GL, et la version musclée de sa Classe S, la S65 AMG. Mitsubishi présentera également un intéressant concept de sportive à motorisation hybride avec des moteurs électriques dans les roues, Nissan une rafraîchissante Urge, sportive light qui plaira aux amateurs de jeux vidéos, Subaru un concept d’hybride tandis que David Richard, le patron de Prodrive, dévoilera sa propre conception de la sportive à traction intégrale sur base Subaru, Volvo sa petite C30.

Un salon riche donc, malgré le contexte.

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