Saga Cadillac Eldorado

Représentation achevée du rêve automobile d'outre-Atlantique, la Cadillac Eldorado incarne l'Amérique triomphante des années 50. Place à l'excentricité, à l'opulence et au glamour capiteux d'une époque mythique…

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CADILLAC Eldorado 1953

Gilles Bonnafous le 15/06/2002

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Dans l'Amérique de l'après-guerre, opulente, triomphante et sure d'elle-même, l'automobile est marquée par l'apologie exacerbée du " toujours plus ". Cadillac reflète à l'envi cet esprit de surenchère permanente, au risque de verser parfois dans l'excès, voire la caricature. Question : de quelle voiture peut rêver l'Américain qui soit au-dessus qu'une Cadillac ? Réponse : une super Cadillac ! A ce jeu, la firme a excellé en faisant comprendre à sa riche clientèle que la possession d'une berline ou d'un " coupé de Ville " de la série 62 ne suffisait pas pour faire définitivement partie du sérail.

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Darin Schnabel, RM Auctions

Au début des années cinquante, alors que Cadillac supplante définitivement Packard dans la hiérarchie automobile d'outre-Atlantique, la production de la marque franchit le cap symbolique des cent mille voitures par an. Un remarquable succès qui comporte toutefois un revers. En accédant au rang de grand constructeur, la prestigieuse division de la General Motors risque de perdre son image d'exclusivité. D'autant que le gratin des marques européennes, Rolls-Royce, Mercedes ou Jaguar, diffuse au compte-gouttes et par le biais d'importateurs indépendants comme Max Hoffmann, des véhicules exclusifs, dont le caractère artisanal et le luxe très " Haute couture " ne peuvent que séduire les clients les plus égotistes. C'est à eux que s'adressera l'Eldorado.

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Darin Schnabel, RM Auctions
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Darin Schnabel, RM Auctions

Produite en petite série, l'Eldorado saura incarner les hauteurs inaccessibles de la gamme Cadillac. Autrement dit, la représentation automobile la plus achevée du rêve américain. A l'image de la Corvette avant qu'elle ne devienne un modèle de série, l'Eldorado est d'abord présentée comme show car dans le cadre du célèbre Motorama de la General Motors. Mais à la différence de la sportive Chevrolet, elle n'a rien d'une voiture techniquement et esthétiquement innovante. Au contraire, son design, qui porte encore les ailerons embryonnaires de 1948, dérive du style Cadillac de 1950. En 1953, année de son apparition et de sa commercialisation hâtive, sa ligne paraît obsolète avec ses flancs trop hauts et son capot massif. La véritable identité de l'Eldorado est celle d'une voiture customisée par Harley Earl et son équipe, qui semblent avoir pris un malin plaisir à forcer le trait en habillant un cabriolet Cadillac de " gimmicks " excentriques. L'audace réside dans l'excès, à la limite de la parodie.

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La seule véritable innovation, dont peut se prévaloir l'Eldorado, est son pare-brise panoramique, intronisé sur le concept car Buick Le Sabre en 1951. Par ailleurs, les stylistes de la General Motors ont cherché à affiner le profil par le creusement de la " beltline " (la ceinture de caisse), l'objectif étant d'abaisser la silhouette de cet imposant paquebot. Le reste relève d'un traitement habile du décor, avec un couvre-capote métallique assorti à la livrée de la carrosserie, des roues à rayons chromées montées en série, et d'un niveau supérieur d'équipement - mais l'air conditionné reste en option.

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Eisenhower lors d 'une parade dans une Eldorado 1953
Eisenhower lors d 'une parade dans une Eldorado 1953 D.R

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RM Auctions
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Le ramage de l'Eldorado n'est pas en reste avec son plumage. Au caractère monumental de la sculpture répond une mécanique qui se veut la plus puissante du marché. Forte de ses 210 ch, l'Eldorado dépasse les Packard et Lincoln et flirte, malgré ses 2,2 tonnes, avec les 180 km/h. Et si, sur la route le freinage ne saurait être un parangon d'efficacité, la voiture apparaît comme un chef-d'œuvre d'onctuosité, de silence et de douceur de fonctionnement.

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RM Auctions
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Performante et hyper équipée, l'Eldorado 1953 est une somptueuse automobile, dont les proportions majestueuses et les galbes felliniens imposent le respect. Son prix de vente déraisonnable - 7700 $, soit presque l'équivalent de deux berlines série 62 - explique une diffusion confidentielle limitée à 532 exemplaires. Cadillac archétypique des années cinquante, la première Eldorado était déjà un mythe avant d'entrer dans l'histoire.

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